Comments for Tintin, Magritte et la liberté d’expression

Khoulalene Sarah
Une des finalités du droit de propriété est d’accorder un droit exclusif au propriétaire de la chose faisant l’objet du droit de propriété. De ce droit découle un droit d’exclusion. En effet, grâce à ce droit de propriété, seul le propriétaire peut disposer de la chose sur laquelle porte le droit, et ce à l’exclusion d’autres personnes. Il en va…
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Une des finalités du droit de propriété est d’accorder un droit exclusif au propriétaire de la chose faisant l’objet du droit de propriété. De ce droit découle un droit d’exclusion. En effet, grâce à ce droit de propriété, seul le propriétaire peut disposer de la chose sur laquelle porte le droit, et ce à l’exclusion d’autres personnes.

Il en va de même en droit de la propriété intellectuelle. En ce qui concerne les droits d’auteurs, on retrouve ce même monopole accordé au créateur de l’œuvre protégée, titulaire du droit d’auteur.

Afin d’être protégée, l’œuvre doit être originale. En d’autres termes, on doit y retrouver la patte de l’auteur, son empreinte. En ce qui concerne les tableaux de Magritte ou les écrits d’Hergé, cette condition d’originalité est, sans conteste, respectée. Conséquemment, leur œuvre est protégée par notre droit.

Néanmoins, ce droit exclusif de propriété intellectuelle reconnu à l’auteur n’est pas absolu. Un article de la loi belge relative aux droits d’auteur en témoigne. Il s’agit de l’article 22 §1er, de la loi du 30 juin 1994 relative au droit d’auteur et aux droits voisins, qui stipule que « lorsque l’œuvre a été licitement publiée, l’auteur ne peut interdire : la parodie, la caricature ou le postiche compte tenu des usages honnêtes ». C’est précisément cette question de la parodie qui a fait l’objet de l’affaire qui nous occupe.

En parodiant ces œuvres, le peintre danois Ole Ahlberg a fait usage de cette exception de parodie accordée par le législateur. Son but était, en effet, d’apporter une touche humoristique, voire décalée, aux œuvres originales, sans que cela ne soit considéré comme une copie illicite du travail des artistes initiaux. En tant que sujet de droit, il est dans son droit le plus intime de faire usage de ses talents d’artiste et de contribuer à l’innovation artistique de notre société. Monsieur Ole Ahlberg a décidé de le faire par la voie de la parodie, expressément accordée par notre législateur.

Une question mérite toutefois d’être soulevée : où se situe la limite relative à cette exception de parodie et de caricature ? Jusqu’où s’étend cette exception? Qu’est-ce qui nous permet de discerner la violation de son monopole sur son œuvre d’une simple parodie amusante pour le public ? Je pense qu’il est important de se pencher davantage sur la question. A mon humble avis, le droit d’auteur a été pour chacun des artistes une révolution et leur a permis d’être pleinement récompensés pour leur travail, leur ingéniosité et leur esprit créatif. Il ne faut dès lors pas perdre cela de vue. Une phrase a retenu mon attention dans le jugement rendu le 19 septembre 2003 par le tribunal de première instance de Bruxelles : « La parodie est une exception au droit d’auteur et non une prérogative du droit d’auteur ». Cette phrase résume très bien l’idée à laquelle je me rallie.

La tendance qui se dessine actuellement est celle où l’on conçoit de plus en plus que de très grandes œuvres soient parodiées. Certes, il est toujours amusant et innovant de voir de vieilles œuvres renaitre sous un nouveau visage. Cela peut même les mettre une nouvelle fois sous les feux de la rampe. Néanmoins, certains auteurs s’en sentent violés dans leurs droits et cela se conçoit totalement. Leur œuvre est souvent l’aboutissement d’un long chemin calqué de réflexion et de travail. L’auteur voyant son œuvre parodiée pourrait concevoir cela comme un dénigrement à l’égard de ce qu’il a fourni.

Par conséquent, même si aujourd’hui il est unanimement admis dans notre droit que la parodie est tout à fait licite – et ce sous certains conditions retenues dans notre jurisprudence –, je pense qu’il serait utile de se pencher sur la question de sa légalité, eu égard aux litiges de plus en plus fréquents relatifs à ce contentieux.

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Arnaud de Beauffort
Deux questions m’apparaissent : 1. Droit d’auteur et procédure Aux termes de l’article 87§1 de la loi du 30 juin 1994 sur le droit d’auteur, le président du tribunal de première instance constate l’existence et ordonne la cessation de toute atteinte au droit d’auteur ou à un droit voisin (action en cessation). L’auteur a le droit exclusif de reproduire (ou d’autoriser…
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Deux questions m’apparaissent :

1. Droit d’auteur et procédure

Aux termes de l’article 87§1 de la loi du 30 juin 1994 sur le droit d’auteur, le président du tribunal de première instance constate l’existence et ordonne la cessation de toute atteinte au droit d’auteur ou à un droit voisin (action en cessation).

L’auteur a le droit exclusif de reproduire (ou d’autoriser la reproduction), le droit exclusif de communiquer son œuvre au public et jouit d’un droit moral inaliénable sur son œuvre.

En l’espèce, M. Ole Ahlberg reprochait aux ayants droit d’Hergé et Magritte de violer, par leurs comportements, son droit d’auteur.

Le premier juge considère que M. Ole Ahlberg ne pouvait introduire une action en cessation parce que celle-ci était fondée, selon lui, sur l’exception de parodie.

Une telle exception au droit d’auteur ne peut servir de base à une action en cessation qui a pour objet de réprimer une atteinte à un droit d’auteur.

La cour d’appel considère, quant à elle, que les œuvres de M. Ole Ahlberg sont protégées par le droit d’auteur et que les comportements (mise en demeure, constat d’huissier, …) des ayants droit d’Hergé et Magritte portent atteinte au droit d’auteur de M. Ole Ahlberg (puisque ses œuvres sont considérées comme originales et donc protégées).

La Cour de cassation se penche uniquement sur une question de procédure : l’article 87§1 ne permet une action en cessation que pour une atteinte au droit d’auteur.

Or, les comportements des ayants droit d’Hergé et Magritte ne sont pas à proprement parler des atteintes aux droits exclusifs de l’auteur (atteinte à son droit de reproduire, à son droit de communiquer, à son droit moral). Ces comportements, à les supposer illégaux, ne peuvent donc pas être sanctionnés par l’action en cessation qui est exceptionnelle et donc d’interprétation stricte.

Il y a fort à parier que la cour d’appel de Liège, juridiction de renvoi, ne déboute M. Ole Ahlberg de son action en cessation…
Le fond du litige ne sera pas réglé pour autant.

2. L’exception de parodie ne peut être invoquée que « compte tenu des usages honnêtes » (art. 22 de la loi).

Le but recherché est de railler, de faire rire mais il ne peut être autorisé que le but recherché soit celui de nuire ou de dénigrer.

Le droit de pasticher n’emporte pas celui de porter atteinte à l’honneur et à la considération de l’auteur.

C’est une question d’appréciation de fait par le juge que de savoir si les usages honnêtes sont respectés.

Parodier l’œuvre d’Hergé en plaçant Tintin, son héros, dans des situations érotiques compromettantes peut sans doute être considéré comme portant atteinte à l’honneur et à la considération d’Hergé. Qu’il n’y ait pas de confusion entre les deux œuvres, qu’il soit clair que l’œuvre « érotique » ne soit pas celle d’Hergé, que le but recherché soit de rire et de se moquer ne sont pas suffisants pour prétendre qu’il n’y a pas atteinte à l’honneur d’Hergé.

Par contre, placer les « Dupond et Dupont » avec leur chapeau melon dans les nuages ne peut vraisemblablement pas être considéré comme portant atteinte à l’honneur et la considération d’Hergé.

Comme on le voit, il s’agira essentiellement d’une appréciation de fait au cas par cas.

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Broisson simon
Droit intellectuel : article Tintin, Magritte et la liberté d’expression Dans notre société actuelle, rigoureuse et inflexible, par quoi pourrait remplacer le ton humoristique et la dérision qui connaissent un immense succès depuis ces 20 dernières années ? En effet, combien de films, de dessins ou encore de pièces de théâtre se sont vu…
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Droit intellectuel : article
Tintin, Magritte et la liberté d’expression

Dans notre société actuelle, rigoureuse et inflexible, par quoi pourrait remplacer le ton humoristique et la dérision qui connaissent un immense succès depuis ces 20 dernières années ? En effet, combien de films, de dessins ou encore de pièces de théâtre se sont vu caricaturés pour le bonheur de milliers de personnes ?
Dès lors, en quoi les auteurs des œuvres caricaturées entraveraient-ils le droit de paternité portant sur les œuvres primaires ?
Effectivement, comme le prévoit l’article 22 §1er de la LDA : « Lorsque l’œuvre a été licitement publiée, l’auteur ne peut interdire : la parodie, la caricature ou le postiche compte tenu des usages honnêtes. »
En conséquence, il est de coutume que la jurisprudence considère que la parodie est une exception à l’atteinte des droits d’auteur si l’œuvre caricaturée répond à 5 conditions ;
– La parodie doit elle-même être une œuvre originale
– Elle doit être faite dans le but de rallier l’œuvre parodiée
– Elle doit avoir pour but de faire rire
– La parodie doit se limiter à emprunter les éléments apparents de l’œuvre et strictement nécessaires à la caricature pour ne pas entrainer de confusion avec l’œuvre parodiée
– La parodie ne doit pas profiter de l’œuvre parodiée
Remarquons qu’une partie de la doctrine tend à considérer que cette dernière condition apparait comme curieuse puisqu’il est normal que les parodistes s’appuient sur des œuvres connues par le public.

A titre exemplatif, une jurisprudence française a admis que la reproduction sur un tee-shirt d’un personnage reprenant les traits essentiels de « Monsieur Propre » assorti d’une coloration rose fuchsia et d’indications « Mister Quenn » et « Axel is a Bitch « ne portait en aucun cas atteinte aux droits de paternité de l’auteur de l’œuvre originale, estimant que ces adjonctions constituaient une modification essentielle destinée à démarquer le personnage caricatural de l’original.

En conclusion, avec un esprit ouvert et indulgent, il apparait clairement qu’en aucune façon l’objectif de Monsieur O. Alsbergh n’était pas de dénigrer les œuvres originales mais plutôt d’amuser un public large d’esprit. Ainsi, on peut aisément considérer, in casu, que les différentes conditions prévues par la jurisprudence sont remplies et qu’en aucun cas il n’y a atteinte aux droits d’auteur. Enfin, je pense qu’un petit peu de fantaisie dans ce monde parfois obtus est essentiel pour le bonheur et l’amusement des personnes. C’ est pourquoi un humour au second degré doit être accepté…

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Quentin Paquet
Le droit d’auteur est un droit fondamental dans l’apanage des droits de propriété intellectuelle. Il est protégé par la loi sur le droit d’auteur (ci-après, « LDA ») du 30 juin 1994 . Le principe est que l’on ne peut porter atteinte aux droits des auteurs sur leur propre œuvre. Néanmoins, comme tout principe, celui-ci comporte des exceptions, énumérées aux articles…
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Le droit d’auteur est un droit fondamental dans l’apanage des droits de propriété intellectuelle. Il est protégé par la loi sur le droit d’auteur (ci-après, « LDA ») du 30 juin 1994 .
Le principe est que l’on ne peut porter atteinte aux droits des auteurs sur leur propre œuvre. Néanmoins, comme tout principe, celui-ci comporte des exceptions, énumérées aux articles 21 à 23 de la LDA. Parmi celles-ci se trouve «(…) la caricature, la parodie ou le pastiche(…) » . Le but principal de cette exception n’est autre que la protection de la liberté d’expression, droit également fondamental puisque protégé par l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Il s’agit, contrairement à ce que l’on appelle les « licences «égales », d’une exception au sens strict, ce qui signifie que l’auteur de l’œuvre originaire ne peut s’opposer à l’utilisation de son œuvre, ni percevoir une quelconque rémunération la concernant. Toutefois, des conditions furent mises en œuvre par la jurisprudence afin de renforcer cette exception. Elles sont au nombre de cinq :
– La parodie doit elle-même constituer une œuvre originale ;
– Elle doit être faite dans le but de railler l’œuvre originale ;
– Son but doit être de faire rire, avoir un ton humoristique ;
– Elle doit se limiter à emprunter les éléments apparents de l’œuvre et strictement nécessaire à la caricature pour ne pas entraîner de confusion avec l’œuvre parodiée, ni la dénigrer ;
– Elle ne doit pas profiter de l’œuvre parodiée.
Les trois premières conditions ne semblent pas, dans le cas présent, pouvoir susciter la critique. La 4ème cependant, qui incite à ne pas constituer de confusion qui entrainerait un dénigrement ne me semble pas non plus appropriée dans le cas de Monsieur Ole Ahlberg. En effet, l’humour est selon moi une possibilité de voir la vie d’un autre œil, de tourner certaines situations à la dérision ce qui m’apparaît très important, surtout à l’heure actuelle où nous n’entendons plus parler que de crise économique, d’attentats, de pédophilie et autres homicides, faits plus attristant les uns que les autres.
Dernière condition requise par la jurisprudence, le pastiche ne doit pas tirer profit de l’œuvre parodiée. Cette condition semble assez contradictoire avec l’exception prévue par l’article 22, §1er, 6° de la LDA étant donné que c’est précisément parce que l’œuvre parodiée est connue qu’il y a un intérêt de l’adapter.
En conclusion, il semble que les œuvres de Monsieur Ole Alhberg répondent aux conditions émises par les cours et tribunaux.
Après ces considérations sommes toutes assez théorique, passons à l’aspect un peu plus pratique de cette intervention.
Les ayants-droit d’Hergé et de Magritte ont donc intenté une action envers ce peintre danois.
Selon moi, en dehors du fait qu’a priori les œuvres de Monsieur Ole Alhberg rentrent bel et bien dans l’exception de parodie, il ne faut pas perdre de vue que ces œuvres peuvent également constituer une publicité pour les tableaux de Magritte et l’ensemble de l’univers de Tintin. En effet, les visiteurs des expositions de ce peintre feront presque automatiquement le lien entre ces œuvres et celles de Magritte et d’Hergé.
Ceci étant dit, bien qu’il ne soit pas contestable que le droit d’auteur est un droit fondamental, que ce soit dans le chef de l’auteur de l’œuvre ou celui de ses ayants-droits, il ne faudrait pas que les tentatives de respect coûte que coûte de l’œuvre ne viennent faire une contre-publicité de celle-ci, comme il me semble que nous ne soyons pas très loin dans le cas qui nous occupe.
En conclusion je dirais que oui, le droit d’auteur doit être respecté, mais pas à n’importe quel prix, et pas en attaquant systématiquement la moindre utilisation de l’œuvre.

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Markarian Louisa
La problématique qui est soulevée dans cette affaire est très complexe puisqu’il s’agit d’un conflit entre le droit de propriété intellectuelle, plus précisément le droit d’auteur et le droit à la liberté d’expression. Ce sont deux droits fondamentaux mais qui ont une nature différente. En effet, le droit d’auteur confère un monopole économique à celui qui en bénéfice et le…
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La problématique qui est soulevée dans cette affaire est très complexe puisqu’il s’agit d’un conflit entre le droit de propriété intellectuelle, plus précisément le droit d’auteur et le droit à la liberté d’expression.

Ce sont deux droits fondamentaux mais qui ont une nature différente. En effet, le droit d’auteur confère un monopole économique à celui qui en bénéfice et le droit à la liberté d’expression est un droit fondamental qui est essentiel dans une société qui se revendique démocratique.

La liberté d’expression est consacrée par une panoplie de textes juridiques tels que l’article 19 de la Déclaration Universelle des droits de l’homme, l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, les articles 19 et 25 de notre Constitution, etc.

On pourrait se demander ce qu’on entend par la liberté d’expression ? Il s’agit là d’une question très complexe à laquelle la jurisprudence fait face tous les jours. En vertu de l’article 10, alinéa 1er de la CEDH, la liberté d’expression permet à toute personne une liberté d’opinion, elle permet également « la liberté de recevoir ou communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir d’ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontières ».

Toutefois, il faut savoir que cette liberté d’expression n’est pas absolue puisque l’article 10, dans son deuxième alinéa, apporte quelques restrictions à ce droit.

Plus particulièrement, il faut savoir qu’il y a plusieurs exceptions au droit d’auteur qui ont été insérées dans la loi belge sur le droit d’auteur en faveur de la liberté d’expression, et pour ne citer que ce qui nous concerne, l’article 22, §1er, 6° de la loi considère que la parodie, la pastiche et la caricature ne sont pas des atteintes au droit d’auteur « lorsque l’œuvre a été licitement publiée, l’auteur ne peut interdire la caricature, la parodie ou le pastiche, compte tenu des usages honnêtes ».

La parodie échappe à l’autorisation de l’auteur si plusieurs conditions (cumulatives) se trouvent réunies : il doit s’agir d’une œuvre originale, elle doit avoir pour but de railler l’œuvre parodiée, elle doit également avoir un ton humoristique, la parodie ne doit emprunter que des éléments apparents de l’œuvre et strictement nécessaires à la caricature pour ne pas entrainer de confusion avec l’œuvre parodiée, elle doit avoir été licitement divulguée au public et enfin, la parodie ne doit pas dénigrer l’œuvre ou porter atteinte à la réputation de son auteur.

Dans l’affaire « Ahlberg c/SA Moulinsart » qui nous concerne, la Cour d’Appel de Bruxelles, dans un arrêt du 14 juin 2007 considère que les œuvres contestées sont des peintures originales et qu’elles sont, dès lors, protégées par le droit d’auteur. Il déclare également que ces tableaux réunissent les conditions de l’exception de parodie et que les ayants droit d’Hergé et de Magritte ne pouvaient donc pas s’opposer à l’exploitation de ces derniers.

Un pourvoi en cassation a été introduit par les défendeurs, lequel été accueilli par la Cour. Celle-ci a renvoyé l’affaire devant la Cour d’Appel de Liège et le dossier reste à suivre.

Dans cette affaire, la Cour d’Appel de Liège va être confrontée à la question délicate de savoir comment concilier le droit d’auteur et la liberté d’expression, et plus particulièrement comment permettre la parodie, qui est un exemple très illustratif de la liberté d’expression, et en même temps respecter la protection conférée par le droit d’auteur.

Certes les avis sont partagés sur la question, mais selon moi il n’existe pas une réponse parfaite qui convienne. L’idéal serait de trouver une solution qui conviendrait à toutes les parties. Si chacune accepte de limiter son droit fondamental, que ce soit le droit d’auteur ou le droit à la liberté d’expression, les choses seraient plus faciles. Malheureusement, l’être humain ne raisonne pas toujours de la sorte et il est souvent guidé par de vagues principes ou par des raisons économiques qui conduisent à ce type de conflit. Et la Cour d’Appel de Liège, dans la décision qu’elle sera amené à prendre, causera nécessairement un préjudice à l’une des deux parties, mais elle essaiera de trouver une solution qui, pour elle, semble la plus juste en vertu du droit. Telle est le raisonnement que devra suivre la juridiction d’appel car, dans cette affaire, il n’y aura jamais une unanimité de la jurisprudence. Tel est d’ailleurs le cas dans toutes les affaires qui impliquent la conciliation de deux droits fondamentaux.

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Margaux Daxhelet
Cette affaire est l’occasion de revenir sur quelques règles relatives à la protection du droit d’auteur et à ses exceptions. Selon l’article 22, 6° de la LDA, « lorsque l’œuvre a été licitement publiée, l’auteur ne peut interdire la caricature, la parodie ou le pastiche, compte tenu des usages honnêtes ». Jurisprudence et doctrine sont venues préciser les conditions auxquelles…
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Cette affaire est l’occasion de revenir sur quelques règles relatives à la protection du droit d’auteur et à ses exceptions.

Selon l’article 22, 6° de la LDA, « lorsque l’œuvre a été licitement publiée, l’auteur ne peut interdire la caricature, la parodie ou le pastiche, compte tenu des usages honnêtes ».
Jurisprudence et doctrine sont venues préciser les conditions auxquelles doit répondre une parodie pour être autorisée : elle doit elle-même constituer une œuvre originale et être faite de façon à railler l’œuvre parodiée sur un ton humoristique. En outre, elle ne peut reprendre que les éléments strictement nécessaires à la parodie, sans entraîner de confusion avec l’œuvre parodiée. La parodie ne peut ni dénigrer l’œuvre source ni profiter de sa renommée.

Les personnages des aventures de Tintin ont été peints par Olé Ahlbergh dans des situations surréalistes à connotation sexuelle. La Cour d’appel de Bruxelles a jugé que ces tableaux constituaient une parodie permise, réformant la décision du Tribunal de première instance.
On remarque la difficulté de trancher et l’inévitable part de subjectivité présente dans ce genre de décisions.

Un parodiste poursuit les ayants-droit des auteurs de l’œuvre parodiée, leur reprochant de porter atteinte à son droit d’auteur. C’est étonnant, car en général c’est l’inverse qui se produit.

Mr. Ahlbergh pouvait-il agir sur la base de l’article 87 de la LDA ?
Nous sommes d’avis que l’action en cessation visée à cet article peut se fonder tant sur un droit patrimonial que sur un droit moral. La disposition vise effectivement « toute atteinte au droit d’auteur ». De plus, les agissements de la société Moulinsart peuvent constituer une telle atteinte. Ils empêchent sans aucun doute la communication au public des peintures et compromettent sérieusement les chances du peintre de se faire reconnaître comme l’auteur des ses créations (droit de paternité).

Pour être mise en œuvre, cette action en cessation doit se fonder sur un droit d’auteur.
En définitive, la question qu’il faut se poser est celle de savoir si une parodie peut être protégée par un tel droit.

Pour être protégée par le droit d’auteur, une œuvre doit être originale, c’est-à-dire qu’elle doit être l’expression de l’effort intellectuel de son auteur ou encore refléter l’empreinte de la personnalité de son auteur. Remarquons que l’originalité se distingue de la nouveauté. Une œuvre parodique (devant elle-même être originale pour être permise) est donc protégeable par le droit d’auteur. Si les peintures du peintre danois sont jugées originales, celui –ci peut donc agir sur la base de l’article 87. A la condition, toutefois, de ne pas porter préjudice à d’autres droits d’auteur. Les œuvres d’Ahlberg pourraient, en effet, être vues comme dénigrantes, voire parasitaires. La parodie n’est permise qu’à certaines conditions. Si elles ne sont pas remplies, les ayants-droit d’Hergé et de Magritte pourront s’opposer à la diffusion des tableaux. En empruntant les principaux personnages de l’œuvre d’Hergé, on peut considérer qu’Ahlberg a repris des éléments essentiels de l’œuvre qu’il souhaitait parodier. Nous l’avons dit, une parodie doit se contenter de reprendre les éléments strictement nécessaires à la réalisation de son but. Le peintre aurait-il dépassé les limites ? Tel n’a pas été le sentiment du juge de la Cour d’appel de Bruxelles. Cette décision a cependant été cassée par notre Cour de cassation. Affaire à suivre.

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Piersotte Yannick  
Après la lecture de cet article, il me semble que l’on peut se poser quelques questions. En voici quelques unes que nous tâcherons de répondre selon nos moyens. La première question que l’on se pose immédiatement après la lecture de l’article me semble être la suivante : « Est-ce que les œuvres de M. Ole Ahlberg constituent des œuvres appart…
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Après la lecture de cet article, il me semble que l’on peut se poser quelques questions. En voici quelques unes que nous tâcherons de répondre selon nos moyens.

La première question que l’on se pose immédiatement après la lecture de l’article me semble être la suivante : « Est-ce que les œuvres de M. Ole Ahlberg constituent des œuvres appart entières pouvant être protégées par la loi du 30 juin 1994 relative au droit d’auteur et aux droits voisins (LDA) ? » Face à cette interrogation, plusieurs réponses sont envisageables. Par exemple, si l’on suit le raisonnement tenu par la Cour d’appel de Bruxelles, nous devrions considérer que les œuvres de Mr. Ole Ahlbert sont suffisamment originales pour être protégées par la LDA 1994. Par contre, d’autres estimeront qu’il s’agit là uniquement de contrefaçons des dessins de Tintin et des peintures de Magritte tel qu’il l’a été décidé lors du premier jugement entre l’auteur danois et les héritiers de ces artistes.
Mon point de vue est le suivant : De prime abord, nous pourrions invoquer la parodie comme exception au droit d’auteur afin de ne pas avoir à demander à l’artiste ou à ses ayants droits l’autorisation afin de parodier une œuvre. Cependant, il me paraît assez clair que l’œuvre dont il est question dans le présent article ne correspond absolument pas à l’esprit et la sensibilité de Georges Remi, alias Hergé, ou bien encore celui de Magritte. En effet, il reflète de manière assez flagrante que les œuvres de l’artiste danois ont un caractère sexuel assez prononcé de sorte que le public pourrait se sentir trompé et ne rencontrerait plus les objectifs des artistes.

En effet, il me semble évident que l’exception de parodie au droit d’auteur ne peut absolument pas se justifier dans l’affaire qui nous occupe par le simple fait que les œuvres de l’artiste danois dénigre l’œuvre d’Hergé et porte de cette façon atteinte à son droit d’auteur.
Cet article me fait penser à une autre affaire similaire à celle-ci dont l’artiste n’était autre que Jan Bucquoy. Dans cette affaire, la société belge Dolle-Morgen avait édité une bande dessinée de l’artiste Néerlandais intitulée « La vie sexuelle de Tintin et d’autres belges célèbres ». L’artiste fût condamné par le tribunal de grande instance de Paris à verser un euro de dommages et intérêts à Fanny Vlamynck, la veuve d’Hergé et détentrice des droits. Le tribunal avait estimé que Jan Bucquoy avait eu une vision, je cite « systématiquement négative et outrancière » de l’œuvre d’Hergé manifestant une volonté de dénigrement. Pour ce faire, le juge français s’était essentiellement basé sur la vie d’Hergé afin d’y démontrer que ce dernier s’était montré tout au long de sa vie très discret sur sa vie privée de sorte que l’œuvre de Jan Bucquoy ne rentrait plus dans les conditions de la parodie, exception au droit d’auteur.

Partant d’un autre point de vue, il est un fait certain que l’art en général est en constante évolution mais qu’il se base aussi et surtout sur des chefs d’œuvres passés qui sont des sources d’inspiration indéniables pour nos artistes contemporains. On comprend donc toute la difficulté d’accorder aujourd’hui un droit d’auteur sur une nouvelle œuvre, originale et créative lorsqu’elle s’inspire d’une œuvre déjà existante. A cet égard, nous pouvons y déceler une certaine opposition entre d’un côté le refus d’octroyer une protection à une œuvre par le droit d’auteur, et d’un autre côté ce refus qui met un frein au développement de l’art contemporain. Ici me semble-t-il se trouve tout l’enjeu de la problématique qui nous occupe.

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Nicolas Brahy
Bonjour Commentaire intéressant mais vous présentez deux questions comme liées alors qu'elles sont (plutôt) séparées: -l'oeuvre d'alhberg peut-elle bénéficier de l'exception de parodie? -l'oeuvre d'Alhberg peut-elle être protgée par le droit d'auteur? Les deux choses sont distinctes: -si els conditions sont remplies, l'exeption de parodie dispense l'artiste 2 (ici Alhberg) d'obtenir la permission de l'artiste 1 (ici Hergé) pour exploiter l'oeuvre 2. -la protéction…
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Bonjour
Commentaire intéressant mais vous présentez deux questions comme liées alors qu’elles sont (plutôt) séparées:
-l’oeuvre d’alhberg peut-elle bénéficier de l’exception de parodie?
-l’oeuvre d’Alhberg peut-elle être protgée par le droit d’auteur?

Les deux choses sont distinctes:
-si els conditions sont remplies, l’exeption de parodie dispense l’artiste 2 (ici Alhberg) d’obtenir la permission de l’artiste 1 (ici Hergé) pour exploiter l’oeuvre 2.
-la protéction de l’oeuvre 2 ne dépend pas de l’exemtion de parodie mais des conditions de protection: mise en forme et originalité, le seuil d’exigence pour le second critère étant généralement faible.

Donc on peut très bien considérer que l’oeuvre 2 est une protégée par le droit d’auteur sans bénéficier de l’exception de parodie. Dans ce cas l’auteur 2 a certains droits sur son oeuvre (il peut par exemple interdire à un tiers de la copier ou de la communiquer au public) mais l’exploitation de l’oeuvre 2 reste sujette à l’autorisation de l’auteur 1.

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Lambot Evylou
Le droit d’auteur est protégé par la loi du 30 juin 1994. Celle-ci prévoit cependant des utilisations qui peuvent se faire sans porter atteinte à ce droit. Ce sont les exceptions. Ces exceptions ont été prises dans le but de protéger certains droits fondamentaux du public, notamment la liberté d’expression. Il existe deux catégories d’exception. Les exceptions au sens strict…
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Le droit d’auteur est protégé par la loi du 30 juin 1994. Celle-ci prévoit cependant des utilisations qui peuvent se faire sans porter atteinte à ce droit. Ce sont les exceptions.
Ces exceptions ont été prises dans le but de protéger certains droits fondamentaux du public, notamment la liberté d’expression.
Il existe deux catégories d’exception. Les exceptions au sens strict concernent les cas où l’auteur ne peut pas s’opposer à l’utilisation qui est faite de son œuvre. C’est le cas de la parodie, par exemple. Les autres exceptions sont les cas des licences légales pour lesquelles l’auteur perçoit une contrepartie financière.
L’article 22,§1,6° de la loi sur les droits d’auteur réglemente l’exception de la parodie en ces termes :
« lorsque l’œuvre a été licitement publiée, l’auteur ne peut interdire la caricature, la parodie ou le pastiche, compte tenu des usages honnêtes. »
La parodie est autorisée pour protéger la liberté d’expression du public. Cet article est restreint et ne mentionne que les « usages honnêtes ». Toutefois, la jurisprudence est plus large puisqu’elle prévoit 5 conditions pour que l’œuvre soit considérée comme une parodie :
– Elle doit constituer une œuvre originale
– Elle doit être faite dans le but de railler l’œuvre parodiée
– Le but de la parodie doit être de faire rire
– Elle doit se limiter à emprunter des éléments apparents de l’œuvre et strictement nécessaires à la parodie pour ne pas entrainer de confusion avec l’œuvre parodiée, ni la dénigrer
– Elle ne doit pas profiter à l’œuvre parodiée

Venons-en au cas de la parodie réalisée par Ole Ahlberg.
Dans ce cas-ci, la question peut se poser de savoir si la parodie fait rire. L’exception de parodie a été refusée à Jan Bucquoy dans un cas similaire. Auteur d’une bande dessinée, il racontait les péripéties sexuelles de Tintin. Le juge a ainsi considéré que le but n’était pas de faire rire mais de dénigrer l’œuvre. Les faits sont les mêmes dans le cas de Ole Ahlberg dont le but n’est pas de faire rire, mais de dénigrer l’œuvre d’Hergé en présentant Tintin dans des positions érotiques.
L’exception de parodie devrait donc, selon moi, être refusée par la Cour puisqu’elle a pour but de dénigrer l’œuvre et ne peut donc être protégée par l’exception de la parodie. Cette utilisation porte atteinte au droit d’auteur d’Hergé.
En ce qui concerne le droit d’auteur de Monsieur Ole Ahlberg, la condition pour qu’il soit applicable, est qu’il y ait une mise en forme de l’œuvre, que celle-ci dépasse la simple idée, et qu’elle soit originale.
Ce critère n’est pas défini dans la loi sur les droits d’auteur, mais la jurisprudence, à l’image de la Cour de cassation, considère qu’il faut que l’oeuvre soit l’expression d’un effort intellectuel de son auteur. Dans ce cas, Monsieur Ole Ahlberg, même s’il a fait un effort intellectuel pour imaginer le personnage de Tintin dans un autre contexte que l’a fait Hergé, il n’a fait aucun effort intellectuel pour créer ce personnage qui existait déjà et que tout le monde connait. Par conséquent, selon moi, son œuvre ne présente pas d’originalité au sens de la définition de la Cour de cassation et le droit d’auteur ne peut être reconnu sur cette œuvre.
De plus, il est incompréhensible que la Cour d’appel considère que ces œuvres soient à la fois susceptibles de faire l’objet d’un droit d’auteur de Monsieur Ole Ahlberg et, en même temps, qu’elles remplissent les conditions de la parodie, puisque celle-ci est une exception aux droits d’auteur.
La Cour aurait dû trancher entre ces deux options.

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MARIA COPPENS
Quelle ironie que celle qui se dégage de ce texte ! N’y a-t-il en effet pas plus étonnant retournement de situation que celui de voir la partie plaignante reléguée au banc des « accusés » ? A quel dénouement doit-on s’attendre dans le chef de nos juridictions aux avis étrangement semblables à celui d’une girouette. Comme le dit le dicton…
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Quelle ironie que celle qui se dégage de ce texte ! N’y a-t-il en effet pas plus étonnant retournement de situation que celui de voir la partie plaignante reléguée au banc des « accusés » ? A quel dénouement doit-on s’attendre dans le chef de nos juridictions aux avis étrangement semblables à celui d’une girouette. Comme le dit le dicton (quelque peu modifié), « les avis passent mais ne se ressemblent pas ! ». Pour sûr, le résultat s’annonce aussi incertain que stupéfiant.

Pour ma part, je rejoins assez bien l’analyse développée par Maitre Alain Berenboom, défenseur des intérêts de Tintin et Magritte : « Les peintures d’Ahlberg ne sont ni critiques, ni humoristiques et ne respectent rien ». Le caractère injurieux et le risque de confusion qu’induit presque irrémédiablement la connotation sexuelle présente dans les œuvres d’Ole Ahlberg, participe à la perversion de ce personnage aux aventures variées et rocambolesques. De manière générale, la condition de respect de l’œuvre originale, de même que celle afférant au ton humoristique font défaut et m’amène à remettre en cause le bien fondé de l’exception de parodie telle qu’elle a été admise par la juridiction d’appel en 2007.

Certes, il importe de faire preuve d’une certaine ouverture d’esprit, de laisser libre cours à l’imagination des artistes, … je rejoins en cela l’objectif d’incitation promu par le droit d’auteur. Mais n’y a-t-il pas certaines limites à ne pas franchir, a fortiori lorsque l’œuvre parodiée dénote à un point tel, qu’elle se situe à contre courant du souhait manifesté par son auteur d’origine de son vivant, et repris avec vigueur par ses ayants droits dans un souci du respect de la mémoire. A partir du moment où le parodiste fait le choix de porter atteinte à l’esprit de l’œuvre dans la mesure où il en change profondément le sens, la protection de la liberté d’expression, affichée comme objectif premier de l’exception de parodie, ne semble plus de mise !

Hergé défend des valeurs dans lesquelles bon nombre de gens se reconnaissent, acceptent, partagent, et promeuvent eux-mêmes. Y insérer un degré d’érotisme oriente les personnages dans une trajectoire totalement différente des objectifs de l’artiste.

Par ailleurs, le débat perdrait toute sa raison d’être dès lors que l’œuvre initiale aurait perdu le bénéfice de sa protection par le droit d’auteur et serait tombée dans le domaine public, ce qui, en l’espèce, n’est pas encore au goût du jour, mais m’amène à aborder la thématique de la durée du droit d’auteur, très justement mise en exergue par Charlotte Parent. La durée des droits d’auteur devrait être liée au nombre de BD émises et au succès qui en a résulté, de même qu’à l’ampleur de la diffusion mondiale et en conséquence des traductions existantes.

Enfin, les allusions pornographiques présentes dans ces peintures seraient-elles finalement le cœur de ces hésitations judiciaires ? Parodie ou non, notre société n’aurait-elle pas encore passé le cap de l’attrait érotique, comme semblent le faire croire certaines décisions de jurisprudence ? Ne serait-ce finalement qu’une question de juge, plus conservateur ou plus déluré ?

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Alix Powis
Une question posée par les épisodes jurisprudentiels opposant la société Moulinsart à deux galeries d’art et à Monsieur Ole Ahlberg peut être « L’art doit-il être protéger contre le droit » ? « Il a été proposé qu’on autorise la saisie de la justice en référé pour faire constater la censure qui serait infligée aux œuvres ou à l’exposition ».…
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Une question posée par les épisodes jurisprudentiels opposant la société Moulinsart à deux galeries d’art et à Monsieur Ole Ahlberg peut être « L’art doit-il être protéger contre le droit » ? « Il a été proposé qu’on autorise la saisie de la justice en référé pour faire constater la censure qui serait infligée aux œuvres ou à l’exposition ». (B. Ebelman et N. Heinrich, “l’art en conflit”, Armillaire, La Découverte, 2002, p.246.)

En effet, une inversion des rôles comme ici peut paraître étonnante, c’est l’artiste qui parodie qui demande une action en cessation pour faire cesser une atteinte à son propre droit d’auteur, or la LDA semble à priori prévoir cette action en cessation en faveur de l’artiste dont l’œuvre est à l’origine des parodies. Comment expliquer cela ?
Les droits d’auteurs sont des droits exclusifs dont dispose l’auteur d’une œuvre originale. Il peut notamment interdire certains usages de son œuvre. Cette dernière possibilité connaît des exceptions légales dont celle de la parodie. C’est comme telle qu’a été reconnue l’œuvre d’Ole Ahlberg par la Cour d’appel de Bruxelles. Cette exception prévue à l’article 22, §1, 6° dépend de conditions qui ne sont pas toujours limpides.
Il est inscrit à l’article 5, §5 de la directive 2001/29/CE que toutes les exceptions légales au droit d’auteur, parmi lesquelles les états-membres ont le choix, doivent respecter un triple test. La parodie est une exception légale réussissant avec brio le test des trois étapes en ce qu’elle est une exception limitée à certains cas spéciaux, qu’elle n’entre pas en conflit avec l’exploitation normale par l’auteur et qu’elle ne cause pas de préjudice déraisonnable aux intérêts légitimes de celui-ci.

Une parodie est une œuvre protégée par le droit d’auteur. L’important est le critère d’originalité. En peinture ce critère s’apprécie particulièrement largement. Premièrement la Cour d’appel de Bruxelles considéra que les œuvres d’Ole Ahlberg étaient bien originales, elles sont « l’expression de sa propre liberté d’expression » en insistant sur la présence « d’évènements visuels inattendus qui allaient à contresens de l’univers d’Hergé ou de Magritte qui n’introduisent pas d’érotisme dans leurs œuvres » (Bruxelles, 14 juin 2007, R.D.C 2007, p.687). Deuxièmement, il n’y a pas de risque de confusion entre la parodie et l’œuvre originale. Troisièmement, le but recherché par Ole Ahlberg est de faire sourire sans vouloir aucunement nuire à l’auteur.

La question que je m’étais posée au départ était “Ne sera-t-on pas amené dans certaines situations à devoir protèger l’art contre le droit ?” Le risque est que des dispositions trop protectrices envers les œuvres d’un auteur institué (Hergé, Magritte) limitent un nouvel auteur dans son élan de créativité. Or il est vital que l’art se renouvelle, il est indéniable que l’art s’inspire des acquis pour créer de nouvelles œuvres.

(G. Keutgen, « l’Art et le droit », conférence du jeune barreau de Bruxelles, Larcier, 2010.)

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Ska Nathalie
Cette « saga judiciaire » opposant les ayants-droit d’Hergé et de Magritte à ce M. Ole Ahlberg est pour le moins surprenante. En effet, nous sommes face à un présumé contrefacteur qui, auteur d’une œuvre dérivée, s’estime lésé par ces ayants-droit. Les ayants-droits de Magritte et de d’Hergé étaient parfaitement en droit d’invoquer d’une part le droit d’adaptation et d’autre part…
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Cette « saga judiciaire » opposant les ayants-droit d’Hergé et de Magritte à ce M. Ole Ahlberg est pour le moins surprenante. En effet, nous sommes face à un présumé contrefacteur qui, auteur d’une œuvre dérivée, s’estime lésé par ces ayants-droit.

Les ayants-droits de Magritte et de d’Hergé étaient parfaitement en droit d’invoquer d’une part le droit d’adaptation et d’autre part le droit moral pour s’opposer à ces œuvres. Par ailleurs, l’auteur d’œuvres dérivées, telles les peintures de M. Ole Ahleberg, est un auteur à proprement parlé et dispose ainsi des mêmes droits que tout auteur d’une œuvre originale. Toutefois, les ayants-droit peuvent s’opposer à la reprise de leur œuvre en une œuvre dérivée.

Néanmoins, ces prérogatives de l’auteur original doivent pouvoir se concilier avec certains principes fondamentaux, parmi lesquels nous pouvons citer le droit à la liberté d’expression. Dans cette perspective, M. Ahleberg sera tout à fait en droit d’opposer à l’action des ayants-droit l’exception de parodie prévue à l’article 22 §1er alinéa 6 de la loi sur le droit d’auteur. Dans une affaire du 29 juillet 2010, la Cour d’appel de Bruxelles avait stipulé « qu’il est généralement admis que cette exception est fondée sur la liberté d’expression et qu’elle constitue ainsi le point d’intersection entre le droit d’auteur et cette liberté fondamentale » . Il s’agissait en l’espèce d’une parodie faite d’un poème de Maurice Carême dans le cadre de l’émission radiophonique de la RTBF « le jeux des dictionnaires ». Dans cette affaire, il s’agissait également « d’une œuvre nouvelle protégeable par le droit d’auteur dès lors qu’il porte l’empreinte personnelle de Monsieur Honorez. Ce sketch porte un regard critique sur cette œuvre. (…) Cette reproduction de l’œuvre jointe à l’absurdité des propos sont telles qu’il ne peut y avoir la moindre confusion » .

Si nous appliquons ces principes au cas d’espèce, il serait tout à fait approprié pour M. Ahleberg de se défendre par l’exception de parodie. Il s’est certes inspiré de l’œuvre de Tintin et de Magritte mais il y a apporté sa touche personnelle, touche qui, vu la déformation par rapport à l’œuvre originale, ne risque pas de créer de la confusion au sein du public.
Il nous parait toutefois peu concevable que le contrefacteur intente lui-même une action. En effet, comme son nom l’indique, l’exception de parodie n’est qu’une exception et non un droit.

De plus, la Cour de cassation a repris l’argumentation du juge du premier degré quant à l’inapplicabilité de l’article 87§1er de la loi sur le droit d’auteur :

« Les droits d’auteur protégés par l’action en cessation au sens de l’article 87§1er, sont uniquement les droits exclusifs prévus par la loi sur le droit d’auteur, plus particulièrement le droit pour l’auteur, prévu par l’article 1er § 1de cette loi, de s’opposer à ce que, sans son autorisation, un tiers reproduise ou communique l’œuvre de l’auteur au public. Cette compétence du président qui est exceptionnelle, dès lors d’interprétation stricte, ne s’étend pas à des agissements de tiers qui ne constituent pas une atteinte aux droits exclusifs de l’auteur au sens précité.

En l’occurrence, les agissements reprochés aux demandeurs ne constituaient nullement des actes de reproduction ou de communication par les demandeurs des œuvres du défendeur, sans son autorisation. Ils portaient uniquement sur des agissements qui auraient empêché ou perturbé le prétendu droit du défendeur d’exposer lui-même ses propres œuvres ou de les communiquer au public. De tels agissements ne pouvaient faire l’objet de l’action en cessation sur la base de l’article 87, §1er. Le seul fait, invoqué par l’arrêt, que le défendeur faisait valoir, à l’appui de sa demande, « sa qualité d’auteur » ne permettait pas d’élargir le champ d’application de ladite disposition en la rendant également applicable à de tels agissements. En procédant à une extension de la notion « d’atteinte au droit d’auteur » aux agissements visés et condamnés par l’arrêt, ce dernier étend indûment cette norme légale ainsi que le champ d’application de l’article 87,§1er , à des actes qui ne constituent pas une atteinte aux droits exclusifs de l’auteur, prévus par l’article 1er §1er , de la loi relative au droit d’auteur et aux droits voisins. »

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Marc Flament
Le droit d'auteur est un droit fondamental. Pour protéger ce droit, une loi de 30 juin 1994 relative au droit d'auteur et aux droits voisins (LDA) a été adoptée. Cette loi prévoit un droit exclusif à l'auteur de l'œuvre mais établit également quelques exceptions à ce droit dont la parodie, le pastiche et la caricature. Sous réserve de quelques conditions, l'auteur…
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Le droit d’auteur est un droit fondamental. Pour protéger ce droit, une loi de 30 juin 1994 relative au droit d’auteur et aux droits voisins (LDA) a été adoptée. Cette loi prévoit un droit exclusif à l’auteur de l’œuvre mais établit également quelques exceptions à ce droit dont la parodie, le pastiche et la caricature.

Sous réserve de quelques conditions, l’auteur d’une œuvre constituant une parodie, par exemple, ne verra pas sa responsabilité pénale ou civile mise en cause. Mais dans le cas présent, la jurisprudence se retrouve face à la question de savoir si cette parodie ne constituerait-elle pas, elle-même, une œuvre à part entière.

Cette hypothèse étant établie, nous pouvons nous poser la question de savoir si l’auteur de la parodie pourrait se prévaloir de la LDA pour sanctionner toute personne qui porterait atteinte à ses droits d’auteur sur cette “œuvre”.

Dans le cas présent, Ole Ahlberg se plaint, sur base de l’article 87 §1er de la LDA, contre les ayants droit de Magritte et d’Hergé s’estimant injustement empêché de faire connaître son œuvre qui, de son point de vue, n’était pas constitutive de contrefaçon.

L’affaire arrive devant la Cour de cassation et il semble que cette dernière en finit par perdre son latin. En effet, l’article 87 §1er de la LDA pose deux conditions, à savoir qu’il existe un droit d’auteur servant de fondement à la demande et qu’il y ait des agissements qui portent atteinte à ce droit.

Concernant la première condition, il ne semble pas contester qu’il existe une œuvre, même si elle parodie une autre. Il semble donc clair qu’il existe un droit patrimonial. La question du droit moral, par contre, est plus floue, la Cour d’appel s’y est essayée mais la Cour de cassation n’en touche, malheureusement, aucun mot.

De toute façon, il semble clair pour Benoit Michaux et Dirk Voorhoof que c’est la deuxième condition qui pose problème à la cour de cassation. La condition centrale pour l’application de l’article 87, § 1er, de la loi est de savoir si les agissements qui précèdent constituent une atteinte au droit d’Ole Ahlberg de communiquer ses œuvres au public, en particulier de les exposer.

A cette question, le juge d’appel a répondu par l’affirmative. La Cour de cassation, en revanche, estime que ces agissements ne permettent pas de décider qu’il y a une atteinte au droit d’auteur allégué. Elle ne fournit cependant aucun motif propre pour son appréciation. On pourrait en déduire qu’elle adopte le motif avancé par les ayants droit dans leur pourvoi. Ceux-ci ont fait valoir que les agissements qui leur étaient reprochés ne constituaient nullement des actes de reproduction ou de communication au public par eux-mêmes des œuvres d’Ole Ahlberg, sans son autorisation.

Donc en suivant cette thèse, la Cour de cassation semble dire que la loi ne sanctionne que les actes de reproduction ou de communication au public commis par des tiers sans l’autorisation de l’auteur. Cependant, la loi, elle, dit qu’elle sanctionne “toute atteinte au droit d’auteur”…L’interprétation de la Cour de cassation semble donc, pour ma part, contra legem.

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Laurine Pauly
Selon moi, l’exception de parodie ne devrait pas être admise et dès lors, les tableaux d’Ole Ahlberg porteraient atteinte aux droits d’auteur d’Hergé et Magritte. J’ai expliqué les raisons de cette position dans mon précédent commentaire. Je critique donc l'arrêt de la Cour d’appel qui a considéré que les conditions étaient réunies. Toutefois, il faut admettre que la Cour de…
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Selon moi, l’exception de parodie ne devrait pas être admise et dès lors, les tableaux d’Ole Ahlberg porteraient atteinte aux droits d’auteur d’Hergé et Magritte. J’ai expliqué les raisons de cette position dans mon précédent commentaire. Je critique donc l’arrêt de la Cour d’appel qui a considéré que les conditions étaient réunies. Toutefois, il faut admettre que la Cour de cassation n’a pas remis en cause la décision du juge d’appel sur ce point. Il y a donc de forte de chance que la juridiction de renvoi (qui statue sur le fond) ne s’attarde plus sur ces conditions en considérant qu’elles sont réunies. Dans ce contexte, si on admet que les tableaux constituent des parodies, il s’agit alors en effet d’œuvres à part entière protégées par le droit d’auteur.

Les prérogatives du droit d’auteur dont le peintre peut invoquer la violation ont été largement développées dans les commentaires précédents: il s’agit du droit de communication au public (droit d’exposition) et des deux droits moraux : paternité et respect de l’œuvre.

Malheureusement, la Cour a totalement éclipsé la question du droit moral de l’auteur dans sa décision. Ce qui est fort regrettable car il est généralement admis qu’une action en cessation peut se fonder sur les prérogatives morales. En réalité, cette décision de la Cour a compliqué très fort les choses et a pour effet d’allonger la situation malheureuse du peintre. Ceci montre effectivement le manque de pratique des cours et tribunaux dans le domaine de la PI. Je rejoins en cela le commentaire de Julian qui critiquait le jugement de première instance. La Cour de cassation ne semble pas plus apte à aborder ce genre de question. La décision fait d’ailleurs l’objet de nombreuses critiques en doctrine.

Selon la Cour, la compétence du président du tribunal est exceptionnelle et d’interprétation stricte et elle ne s’étend pas à des agissements qui ne constituent pas une atteinte aux droits exclusifs du droit d’auteur. La Cour paraît ainsi faire une interprétation stricte de la notion d’ « atteinte » en estimant que les agissements des tiers doivent être des actes d’exploitation. Ce qui est , selon les auteurs, peu justifiable. En effet, l’article 87 §1 de la loi du 30 juin 1994 vise « toute atteinte ». L’enseignement de la Cour serait contraire à loi, si c’est dans ce sens qu’on devait l’interpréter.

Toutefois, nous soulignons que la juridiction de renvoi n’est pas liée par la décision de la Cour de cassation. Elle pourrait ainsi reconnaître à Ole Ahlberg le bénéfice de l’action en cessation. Dans le cas contraire, ce dernier ne serait toutefois pas privé de tout recours. Il pourrait en effet se fonder sur l’article 1382 du C.C. (pour abus de droit dans le chef des ayants droit) ou sur la législation relative à la concurrence déloyale.

S’il se fonde sur l’article 1382 du C.civ., il pourrait invoquer le fait que les ayants droit n’ont pas hésité à provoquer des mesures intempestives de leur propre initiative (sans recourir au juge) et à formuler des exigences excessives.

La législation sur la concurrence déloyale pourrait également être une possibilité d’argumentation. Toutefois, cela aura pour effet de faire basculer le peintre du droit d’auteur vers le droit des entreprises et des consommateurs. Ce qui pour certains est critiquable. Il est vrai que c’est absurde de priver le peintre d’une voie de recours efficace pour dénoncer des atteintes qui touchent à l’essence même du droit d’auteur(1).

(1B. MICHAUX ET D. VOORHOOF, « L’action en cessation vise toute atteinte au droit d’auteur. Qu’est-ce à dire ? », Auteurs & Médias, 2010/4.

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t'Serstevens Eléonore
Le droit d’auteur est caractérisé par deux attributs de droit. D’abord il y a les droits patrimoniaux définis par l’Art. 1er LDA, en vertu duquel « seul l’auteur d’une œuvre littéraire ou artistique a le droit de la reproduire ou d’en autoriser la reproduction (…). Le droit de reproduction comporte notamment le droit exclusif d’en autoriser l’adaptation ou la traduction…
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Le droit d’auteur est caractérisé par deux attributs de droit. D’abord il y a les droits patrimoniaux définis par l’Art. 1er LDA, en vertu duquel « seul l’auteur d’une œuvre littéraire ou artistique a le droit de la reproduire ou d’en autoriser la reproduction (…). Le droit de reproduction comporte notamment le droit exclusif d’en autoriser l’adaptation ou la traduction ». Ensuite, par les droits moraux protégeant la personnalité de l’auteur présente dans l’œuvre. (Art. 1, §2 LDA).

Dans notre cas d’espèce, y a-t-il une atteinte au droit moral de l’auteur ? Les ayants droit d’Hergé pouvaient-ils invoquer le droit à l’intégrité de l’œuvre et s’opposer donc à toute modification ou déformation de l’œuvre ?

Y a-t-il également une atteinte au droit de reproduction ? Monsieur Ole Ahlberg aurait-il du demander l’autorisation de parodier les héros de Hergé ? A priori non, puisque la réalisation de la parodie d’une œuvre ne requiert aucune autorisation préalable de la part de l’auteur. Toutefois, pour cela, il reviendra au juge traitant la suite du dossier, de décider si les tableaux de Monsieur Ole Ahlberg remplissent les caractéristiques de la parodie et peuvent donc être considérés comme telle.

La Directive européenne 2001/29, a consacré officiellement à travers les différents pays de l’Union, la parodie comme une exception légale au principe de base, qu’est le droit d’auteur. Une précision importante est apportée dans son article 5,5 : de fait, celui-ci précise « que les exceptions et limitations prévues dans la Directive ne sont applicables que dans certains cas spéciaux qui ne portent pas atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre ou autre objet protégé, ni ne causent un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire de droit ». La parodie doit constituer elle-même une œuvre originale, c’est-à-dire, qu’elle ne peut entrainer la confusion avec l’œuvre principale, à partir de laquelle, elle n’aura emprunté que certaines données apparentes et nécessaires à la caricature.

Article 22 § 1, 6° de la loi belge sur le droit d’auteur ajoute qu’une parodie sera considérée comme valide, si celle-ci est conforme aux « pratiques loyales ou aux règles de la société quant à ce qui est raisonnablement acceptable ». Mais comment tracer les frontières entre d’un coté la liberté d’expression considérée comme acceptable et inoffensive et de l’autre, celle qui contrarie, blesse, ou bouscule l’opinion publique. Cette lourde tâche reviendrait aux juges qui devront se référer à des critères préétablis, afin de déterminer si la parodie constitue « une nécessité sociale dans une société démocratique ». (Cour. eur. D.H., 29 mars 2005, Alinak vs. Turquie.). Ils prendront également en compte « le caractère satirique du texte et de l’ironie sous-jacente ». (Cour. eur. D.H., 29 mars 2005, Sokolowski vs. Pologne).
Que penser des mises en scènes de Tintin à travers certaines positions équivoques ? Peuvent-elles être considérées comme portant atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre, comme contraire à ce qui est acceptable ?

On pourrait trouver une forme de réponse en se référant aux décisions jurisprudentielles de notre droit. On peut d’ailleurs y remarquer qu’à a plusieurs reprises, les juges belges n’ont pas accepté les parodies à tendances pornographiques.

Tout d’abord lors de la célèbre affaire de la parodie de l’œuvre d’Hergé dans l’album Tintin en Suisse, mettant en scène ce célèbre héros dans des situations d’alcoolisme et de débauche. La Cour d’Appel de Bruxelles a donc rejeté l’exception de parodie puisque in casu, « C. Callico a violé le droit moral de l’auteur sur son œuvre et porté atteinte aux droits patrimoniaux, et que même s’il peut y avoir un droit à la critique, celle-ci ne peut exister au détriment du droit au respect de l’œuvre, qui garantit l’intégrité de celle-ci » (Bruxelles, 8 juin 1978, J.T., 1978, p. 619). Un autre arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles considéra encore comme une atteinte au droit d’auteur de Morris, un album relatant « la vie sexuelle de Lucky Luke ». (Bruxelles, 14 mars 1994, A.G.M., 1996, p. 318). Un arrêt qui nous intéresse d’autant plus concerne le magazine hebdomadaire Humo qui selon la Cour, se serrait servi des albums de Tintin uniquement « comme moyen d’attirer l’attention des acheteurs potentiels du magazine en profitant de la notoriété de ces albums». (Civ., Bruxelles 8 octobre 1996, A.G.M., 2001, p. 357). Il faut en effet savoir aussi, que les juges ont tendance à être moins tolérants quant à l’admissibilité d’une parodie qui aurait uniquement un but commercial.

En conclusion, je suis d’avis qu’à partir du moment où il n’y aurait aucun risque de confusion entre l’œuvre originale et une nouvelle création inventive, une interdiction formelle de toute parodie de Tintin ne peut procéder que d’un esprit étroit d’une nostalgie déplacée pour la censure et d’une restriction maladive. Il n’existerait donc aucune raison de priver les amateurs de ce genre de parodie du droit de se délecter de ce type de digression. Toutefois, à partir du moment où le parodieur commence à se servir du célèbre héro Tintin à des fins de mises en scènes pornographiques, cela dépasse l’ironie, la satire habituelle autorisée aux parodies. Selon moi, toutes les parodies de Monsieur Ole Ahlberg caractérisées par des tendances pornographiques devraient être considérées comme ne pouvant entrer sous la coupe de la protection du principe de liberté d’expression. Car celles-ci porteraient atteinte au droit moral d’intégrité en dénaturant l’œuvre et les héros d’un Hergé qui se retournerait dans sa tombe.

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de Lange Blandine  
Petite question: en quoi est-ce que l’action en cessation de Moulinsart est une atteinte au droit de paternité de Ole Ahlberg ? S’il faut examiner le rôle des droits moraux, n’est ce pas plutôt pour examiner si la base juridique de l’action en cessation de Moulinsart est basée sur le droit de reproduction ou le droit moral ou les deux ? Pour…
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Petite question: en quoi est-ce que l’action en cessation de Moulinsart est une atteinte au droit de paternité de Ole Ahlberg ?

S’il faut examiner le rôle des droits moraux, n’est ce pas plutôt pour examiner si la base juridique de l’action en cessation de Moulinsart est basée sur le droit de reproduction ou le droit moral ou les deux ?

Pour répondre à la première question, je dirai que le droit de paternité de O. Ahlberg a été méconnu car ce dernier n’a pu, en raison des troubles occasionnés par la fondation Moulinsart ( mise en demeure de retirer ses tableaux de l’exposition ect…), montrer à la face du monde qu’il était bien le créateur de cette oeuvre originale et, de ce fait, revendiquer sa paternité sur cette dernière. En effet, Monlinsart en méconnaissant le droit d’exposition et en accusant l’artiste de contre-façon, à empêcher ce dernier à prouver aux tiers qu’il était le concepteur d’une oeuvre à part entière.

Pour ce qui est de la seconde question, il est vrai que dans mon commentaire je me suis presque exclusivement limiter aux droits moraux qui pourraient fonder l’action en cessation. La base juridique de l’action en cessation de Moulinsart repose portant sur deux fondement. Le droit de reproduction et le droit moral. Le droit de reproduction fait partie du panel des droits économiques et patrimoniaux tandis que les droits moraux visent le droit de paternité, le droit de divulgation et le droit au respect de l’oeuvre. Tous deux peuvent servir de base à l’action en cessation.

source : (Note sous Cass., 18 juin 2010, Moulinsart, V.F. et H.C. c. O. Ahlberg, « l’action en cessation vise toute atteinte au droit d’auteur. Qu’est-ce à dire ? de Benoit Michaux et Dirk Voorhoof.

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Charles-Henri Bernard
Les droits moraux conférés à l’auteur d’une œuvre sont de quatre types : il y a le droit moral de divulgation, ceux de paternité et de respect ainsi que celui de repentir ou de retrait. Qui dispose du droit de paternité ? L’auteur de l’œuvre bien évidemment. Que prévoit-il ? La faculté de revendiquer la paternité de l’œuvre, c’est-à-dire le…
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Les droits moraux conférés à l’auteur d’une œuvre sont de quatre types : il y a le droit moral de divulgation, ceux de paternité et de respect ainsi que celui de repentir ou de retrait.

Qui dispose du droit de paternité ? L’auteur de l’œuvre bien évidemment. Que prévoit-il ? La faculté de revendiquer la paternité de l’œuvre, c’est-à-dire le droit de l’auteur de l’œuvre d’être identifié et de proclamer la filiation de sa création. Ce droit oblige tout tiers à faire connaitre le nom de l’auteur d’une œuvre qu’il utilise. Le nom de l’auteur devra, dans toute circonstance accompagner l’exploitation de son œuvre.

Ainsi, par exemple, un éditeur ou un diffuseur devra veiller à ce que le nom de l’auteur soit effectivement indiqué ; tout comme un auteur de film devra indiquer le nom de l’auteur dans le générique de son film.

A contrario, chaque auteur peut aussi utiliser la négation de ce droit : il ne peut être forcé d’y inscrire son véritable nom et peut donc se faire connaitre sous un pseudo, voire même de conserver l’anonymat.

Ces droits moraux sont-ils absolus ? Non, assurément. Ils entrent en concurrence avec d’autres droits fondamentaux. Par exemple, lorsque l’auteur a cédé son œuvre, on devra nuancer ses droits moraux avec le droit de propriété de son acheteur.

En quoi ce droit, dont est titulaire Monsieur Ole Ahlberg, est méconnu ?

Suite à sa mise en demeure de retirer ses œuvres, la fondation protection des droits de Tintin, Moulinsart, compromet la possibilité pour Ole Ahlberg de diffuser son œuvre et, de ce fait, de se faire connaitre comme son auteur à part entière.
S’il subit une interdiction de diffusion et d’exposition, comment peut-il montrer ses talents (potentiels ou réels, à chacun d’en juger) et se faire reconnaitre par la critique comme son auteur légitime ?

Les accusations (fondées ou non, peu importe) émises par Moulinsart empêchent Ole Ahlberg de s’ériger en création original de son œuvre, qui en est, du coup, rabaissée à une œuvre contrefaite.

La fondation Moulinsart viole dès lors, en outre, son droit au respect de son travail. Ces violations multiples et répétées légitiment, selon moi, l’action en cessation lancée par Monsieur Ole Ahlberg.

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Blandine de Lange  
Parodier le héros d’Hergé ne paraît pas étonnant. Il est compréhensible pour un artiste de se pencher sur un tel personnage pour le tourner en dérision. Tintin, héros évoluant parfois dans un univers empreint d’une forte idéologie politique a déjà connu maintes critiques. Certains albums reflètent une façon de concevoir le monde qui n’emporte pas un écho unanime parmi ses…
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Parodier le héros d’Hergé ne paraît pas étonnant. Il est compréhensible pour un artiste de se pencher sur un tel personnage pour le tourner en dérision. Tintin, héros évoluant parfois dans un univers empreint d’une forte idéologie politique a déjà connu maintes critiques. Certains albums reflètent une façon de concevoir le monde qui n’emporte pas un écho unanime parmi ses lecteurs et a déjà connu de virulentes critiques (exemple : les critiques quant à la portée raciste présente dans l’album de Tintin au Congo). On peut, de ce fait, concevoir aisément que certains auteurs et artistes se penchent sur le cas du célèbre reporter pour le singer.
Tout comme la poupée Barbie de Mattel, notre héros sera la cible de grands parodieurs-caricaturistes. Tel que l’œuvre de Tom Forsythe, qui a réalisé la série Food chain Barbie ( C. MAUPAS, « Barbie, SM et copyright », Los Angeles Times, 23 aout 2001, consulté sur http://www.courrierinternational.com/article/2001/08/23/barbie-sm-et-copyright, le 12/04/2012) mettant en scène Barbie dans des postures dégradantes, il y a une réelle volonté de remettre en question la tradition culturelle et la société en général au travers d’images chocs.
Dans notre affaire, il s’agit surtout d’une parodie de Tintin qui met notre héros dans des situations équivoques.
Hergé pour des raisons idéologique mais également pour donner un caractère intemporel au personnage avait décidé de façon consciente d’éluder tout caractère sexuel de ses récits.
Il n’est donc pas étonnant que, dès les années 80, affluent plusieurs parodies sexuelles de Tintin. Le premier caricaturiste-parodieur fut le caustique Jan Bucquoy qui réédita plusieurs parodies pornographiques médiocres du personnage phare d’Hergé. Cet artiste fera preuve de beaucoup de mordant quant à la bonne morale et à l’idéologie bourgeoise, qui selon lui, sont fort présente dans les albums d’Hergé. La fondation Moulinsart intenta un procès à Jan Bucquoy. En vertu de la liberté d’expression et selon le principe de l’exception pour parodie visé à l’article 22, 1§er 6° de la LDA, le dessinateur-caricaturiste vit son droit reconnu par les Cours et Tribunaux belges de telle sorte qu’il ne se vit pas empêcher dans son activité de parodieur de Tintin.
L’aspect juridique de notre problématique repose sur la question de la création artistique et plus précisément sur la question de savoir si l’on a bien à faire, dans notre cas, à une parodie et si cette dernière mérite la même protection que celle prévue pour les créations artistiques en général. On pourra enfin déterminer si la possibilité de faire valoir l’action en cessation était ouverte à l’artiste Ole Ahlberg. Nous pensons qu’il s’agit bien d’une parodie étant entendu que, comme relevé ci-dessus, l’œuvre de O. Ahlberg constitue une critique à celle d’Hergé et est empreinte d’un certain caractère humoristique. De plus, on ne peut que difficilement la confondre avec le travail d’Hergé.
Pour que la création d’Ahlberg constitue une œuvre à part entière et qu’elle soit également protégée par le droit d’auteur, deux conditions doivent se rejoindre. La première est l’originalité. En effet, il faut une conception personnaliste pour constituer un travail digne de protection. L’important est que l’auteur ait apporté à sa conception une part de sa personnalité. Ce qui est notre cas ici. En effet, selon une directive européenne « lorsque l’empreinte personnelle de l’auteur est décelée, l’originalité en découle ». L’originalité peut s’envisager comme étant la plus-value artistique qui vient, à tout le moins, s’ajouter à un patrimoine intellectuel déjà existant, « qu’il appartienne privativement à un autre auteur ou qu’il soit le lot commun de tous les créateurs ». (P.Y. GAUTHIER, Propriété littéraire et artistique, P.U.F., Paris, 2001, p. 50, n°27.)
La seconde condition vise une certaine mise en forme de l’œuvre. Cette condition est également rencontrée dans notre cas puisque la création paraît sous forme de tableaux.
Au vu de ces principes, le droit d’auteur pourra aisément servir de fondement à la demande de notre artiste. Plus particulièrement, le droit moral de la création artistique pourra fonder l’action en cessation visé par l’article 87§1er de la LDA. En effet, la fondation Hergé a méconnu le droit à la paternité et au respect du travail de l’artiste Ahlberg, droits visés par l’article 1§2 de la LDA, en sommant ce dernier de retirer les tableaux en cause de la vente et de toute exposition publique. Les accusations de contrefaçon ne permettent donc pas à Ole Ahlberg d’asseoir sa paternité sur le produit original crée et ces accusations sont aussi néfastes au droit au respect de son travail car on fait passer pour une contrefaçon une œuvre originale qui se veut ironique, créative et singulière.
(Note sous Cass., 18 juin 2010, Moulinsart, V.F. et H.C. c. O. Ahlberg, « l’action en cessation vise toute atteinte au droit d’auteur. Qu’est-ce à dire ? de Benoit Michaux et Dirk Voorhoof.)

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Nicolas Brahy
Petite question: en quoi est-ce que l'action en cessation de Moulinsart est une atteinte au droit de paternité de Ole Ahlberg ? S'il faut examiner le rôle des droits moraux, n'est ce pas plutôt pour examiner si la base juridique de l'action en cessation de Moulinsart est basée sur le droit de reproduction ou le droit moral ou les deux…
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Petite question: en quoi est-ce que l’action en cessation de Moulinsart est une atteinte au droit de paternité de Ole Ahlberg ?

S’il faut examiner le rôle des droits moraux, n’est ce pas plutôt pour examiner si la base juridique de l’action en cessation de Moulinsart est basée sur le droit de reproduction ou le droit moral ou les deux ?

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Pauly Laurine
La conciliation entre liberté d’expression et droit d’auteur est délicate. Ni l’un, ni l’autre ne devrait l’emporter. Il s’agit de trouver un juste équilibre. Ce besoin d’équilibre découle de l’article 10 de la CEDH (1). En effet, ce dernier consacre le droit de toute personne à la liberté d’expression mais prévoit à l’alinéa 2 que l’exercice de cette liberté «…
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La conciliation entre liberté d’expression et droit d’auteur est délicate. Ni l’un, ni l’autre ne devrait l’emporter. Il s’agit de trouver un juste équilibre. Ce besoin d’équilibre découle de l’article 10 de la CEDH (1). En effet, ce dernier consacre le droit de toute personne à la liberté d’expression mais prévoit à l’alinéa 2 que l’exercice de cette liberté « peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, (…), à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire ».

L’exception de parodie apparaît comme une limitation au droit d’auteur en faveur de la liberté de créer. Depuis la directive 2001/29 sur le droit d’auteur dans la société d’information, la parodie est maintenant incluse parmi les exceptions que les états membres peuvent transposer dans leur droit national. Chez nous, l’exception est prévue à l’article 22 paragraphe 1 6° de la LDA. Il s’agit d’une exception non rémunérée. Ainsi, le droit permet à un auteur de s’inspirer de l’œuvre de quelqu’un d’autre dans un but de raillerie.
D’un point de vue économique, cette exception est parfaitement justifiée parce que l’accès que permet l’exception ne réduit pas l’incitation de l’auteur et donc, on peut l’autoriser pour bénéficier de la non rivalité (accès libre). En outre, il s’agit d’une exception non rémunérée parce qu’un système d’indemnisation a un coût aussi et qu’une telle utilisation de l’œuvre de quelqu’un d’autre ne porte pas atteinte aux intérêts de l’auteur.

D’un point de vue juridique, l’article 22 paragraphe 1 6° de la LDA soumet l’exception à certaine conditions : « lorsque l’œuvre a été licitement publiée, l’auteur ne peut interdire : 6° la caricature, la parodie ou le pastiche, compte tenu des usages honnêtes;(…) ». La jurisprudence en la matière a permis de mieux appréhender le contenu de cette disposition et y a ajouté les conditions suivantes : – la parodie doit elle-même constituer une œuvre originale, – elle doit être faite dans le but de railler l’œuvre parodiée, – elle doit avoir un ton humoristique, – elle doit se limiter à emprunter des éléments apparents de l’œuvre, strictement nécessaires à la caricature et, elle ne peut pas entrainer de confusion avec l’œuvre, ni la dénigrer (2).
L’exception de parodie vise donc à protéger la liberté d’expression. Lorsqu’un auteur fait une parodie, l’œuvre parodiée est reproduite et adaptée. Toutefois, si la parodie respecte les conditions énumérées ci-dessus, elle ne violera pas le droit d’auteur.
Il s’agit finalement d’un juste équilibre entre la fonction d’incitation que permet l’exclusivité du droit auteur et la liberté d’expression des autres auteurs.
Sous le couvert de trois mots différents (caricature, parodie et pastiche), le législateur a visé une même réalité, expliquent F. De Visscher et B. Michaux, «à savoir une reproduction par emprunt formel à une œuvre dans le but d’amuser et sans prêter confusion avec celle-ci»; avec ces auteurs, on peut affirmer que «la licéité de la parodie tient essentiellement au respect d’un élément moral: l’intention de faire rire, de railler avec humour, même si le résultat n’est pas atteint» (3). La jurisprudence concernant cette exception est donc très intéressante parce qu’elle touche au juste équilibre qui doit être trouvé entre la liberté de créer et le droit d’auteur. Certes, pour qu’il y ait création, il faut une certaine exclusivité incitant les auteurs à investir. Mais, parallèlement, la liberté d’expression est une liberté fondamentale, consacrée dans divers instruments juridiques. Finalement, cet équilibre est largement trouvé dans l’interprétation des limites internes au droit d’auteur.

Concernant plus précisément le jugement et l’arrêt rendu, plusieurs remarques me sont venues à l’esprit.
Tout d’abord, je me rallie au jugement du tribunal en première instance en vertu duquel l’action visait non pas à faire cesser une atteinte au droit d’auteur mais, à lui permettre d’exercer une exception au droit d’auteur et à mettre en œuvre sa liberté d’expression (4). Dans ce contexte, selon moi, la seule question pertinente est de savoir si les tableaux d’Ole Ahlberg peuvent être qualifiés de parodie.

Lorsqu’on prend la peine de lire les articles doctrinaux au sujet de cette affaire (5), le débat est : l’action d’Ole Ahlberg vise t’-elle la cessation d’une atteinte à son droit d’auteur ? Les auteurs discutent alors longuement sur la question de savoir si les deux conditions de l’action en cessation sont remplies (6) : à savoir l’existence d’un droit d’auteur et des agissements portant atteinte à ce droit. Toutefois, pour moi, le point qui est sujet à discussion se situe en amont : l’auteur pouvait-il porter atteinte au droit d’auteur des héritiers ? Les tableaux d’Ole Ahlberg répondent-ils aux différentes conditions de l’exception de parodie ? En effet, si on considère que les tableaux litigieux ne remplissent pas les conditions, ils ne pourront pas être qualifiés de parodie et violeront le droit d’auteur.

Pour examiner cela plus en détail, focalisons-nous sur le personnage de Tintin. Ce dernier n’est pas encore tombé dans le domaine public. Mais tout ne relève pas de la contrefaçon. Comme on l’a dit, la parodie et le pastiche sont des moyens d’expression parfaitement légaux. Depuis la disparition d’Hergé, Tintin poursuit ainsi ses aventures dans l’univers de la parodie, du pastiche et du piratage. Pour certains auteurs il s’agit de prolonger la “vie” de ce personnage légendaire ou de rendre hommage à Hergé. Pour d’autres, et cela se déroulait déjà du vivant de l’auteur, il est surtout question de montrer les faces cachées de ce héros pur et exemplaire. Tout y passe : sa vie sexuelle, ses vices, ses pensées politiques, ses amitiés secrètes, etc… Les parodies légales et les éditions pirates circulent sur un peu partout. On les trouve sur internet mais aussi chez les libraires. Mais les limites restent floues et sont le sujet de nombreuses polémiques et malentendus.
L’avocat belge Alain Berenboom, spécialisé dans la défense des droits d’auteur, estime que les peintures d’Ole Ahlberg ne sont ni humoristiques, ni critiques. Pour appuyer son point de vue, on peut citer une jurisprudence concernant une parodie de Tintin réalisée par Jean Bucquoy (7). Il s’agissait d’une bande dessinée racontant les péripéties sexuelles de Tintin. En l’espèce, le juge considéra que l’œuvre n’avait pas pour objectif l’humour et que l’auteur cherchait à dénigrer l’œuvre…Par contre, d’autres parodies de Tintin, moins offensantes, ont été autorisées par la jurisprudence. Par exemple, l’exception de parodie a été admise dans le cas d’une reproduction des personnages de Tintin, par un peintre cherchant ainsi à subvertir le sens de la célèbre BD en mettant ses personnages dans une situation irréalistes. Il appartient donc au juge du fond d’apprécier si les conditions de la parodie sont réunies et ce, en vue d’arriver à un juste équilibre. Il s’agit principalement d’une question de fait. «Railler n’est pas dénigrer; se moquer n’est pas vouloir nuire; tout est affaire de bon sens et d’équilibre» (8).
Mais, en tout état de cause, le débat devant la juridiction de renvoi doit se centrer sur le respect des conditions à remplir pour admettre l’exception de parodie. Pour ma part, l’exception ne devrait pas être admise. Le ton humoristique fait défaut et la connotation sexuelle peut être vue comme une dénigration de l’œuvre de Tintin. En outre, ces dernières années, la société (Moulinsart) qui gère les intérêts de Fanny Rodwell, l’ayant-droit d’Hergé, a toujours souhaité que le personnage de Tintin ne soit pas dissocié de l’identité de la série et de sa charte graphique. Cette volonté est pour moi parfaitement légitime. Railler est une chose, mais dénigrer en est une autre. La jurisprudence a d’ailleurs accepté des parodies, mais moins offensantes. Encore une fois, c’est une question d’équilibre…

Sources

(1) A. STROWEL ET F. TULKENS, Droit d’auteur et liberté d’expression : regards francophones, d’Europe et d’ailleurs, Larcier, Belgique, 2006, p. 12.
(2)Ces quatre conditions sont celles proposées, pratiquement dans les mêmes termes, dans un jugement civil de 1996 (Civ. Bruxelles, 15 févr. 1996, A. & M., 1996, p. 319, note L. VAN BUNNEN), et reproduites par A. STROWEL, «La protection des personnages par le droit d’auteur et le droit des marques», dans Droit d’auteur et bande dessinée, Bruylant-LGDJ, 1997, p. 57.
(3) A. DECOURRIÈRE, « Atteintes aux droits de propriété intellectuelle » in X., Postal Mémorialis. Lexique du droit pénal et des lois spéciales, 2010, A268/61.
(4)B. MICHAUX ET D. VOORHOOF, « L’action en cessation vise toute atteinte au droit d’auteur. Qu’est-ce à dire ? », Auteurs & Médias, 2010/4, p.2.
(5)B. MICHAUX ET D. VOORHOOF, « L’action en cessation vise toute atteinte au droit d’auteur. Qu’est-ce à dire ? », o.c., p.3.
(6) Article 87, §1 de la loi du 30 juin 1994.
(7) Généreux, Magazine, L’art libertaire de Jan Bucquoy, n°26, mars-juin 1998. Interdit en France et en Belgique.
(8) A. DECOURRIÈRE , « Atteintes aux droits de propriété intellectuelle » in X., Postal Mémorialis. Lexique du droit pénal et des lois spéciales, 2010, A268/61.

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Clara Van Haeperen
Le droit d’auteur est un droit fondamental qu’il convient de respecter et de faire respecter. Si l’exploitation d’une œuvre sans l’autorisation préalable de son auteur constitue bel et bien un acte de contrefaçon, il existe néanmoins certaines exceptions à ce droit exclusif de l’auteur, dont la parodie, la pastiche ou la caricature ( art. 22, § 1er, 6° LDA) .…
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Le droit d’auteur est un droit fondamental qu’il convient de respecter et de faire respecter. Si l’exploitation d’une œuvre sans l’autorisation préalable de son auteur constitue bel et bien un acte de contrefaçon, il existe néanmoins certaines exceptions à ce droit exclusif de l’auteur, dont la parodie, la pastiche ou la caricature ( art. 22, § 1er, 6° LDA) .

Pour rentrer dans le champ d’application de cette exception, il faut nécessairement qu’aucune confusion avec l’œuvre originale ne soit possible et que, de surcroît, l’auteur de la parodie soit animé non pas d’une intention de nuire à l’œuvre originale mais bien d’une intention humoristique.

A partir du moment où ces conditions sont remplies, l’auteur de la parodie ne pourra donc pas voir sa responsabilité civile et/ou pénale mise en cause pour contrefaçon, et il sera en outre possible de pousser le raisonnement plus loin en considérant que la parodie constitue une œuvre à part entière, elle-même protégée par le droit d’auteur, si toutefois elle en remplit les critères (création de forme originale).

Ce raisonnement permet de considérer comme étant fondée l’action en cessation intentée par l’auteur de la parodie à l’encontre de toute personne portant atteinte aux droits qui lui sont conférés en vertu de la loi relative au droit d’auteur et aux droits voisins. La doctrine est unanime sur le fait qu’une telle action peut se baser sur la violation d’un droit patrimonial, mais un peu moins unanime en ce qui concerne les droits moraux.

L’on peut estimer que, in casu, la société Moulinsart viole non seulement le droit (patrimonial) de communication au public dont dispose Ole Ahlberg, mais également son droit (moral) au respect ainsi que son droit (moral) de paternité, légitimant ainsi l’action en cessation de ce dernier sur base de l’article 87,§1er de la LDA.

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Julian Delplanche
Dans le cadre de ce litige, l’action d’Ole Ahlberg a notamment pour base la violation de son droit moral au respect (dont le régime a été développé ci-avant). Mais il est un cas qui est plus extrême : c’est la situation dans laquelle le propriétaire de l’œuvre originale, qui a été cédée par l’auteur, en menace la pérennité ou la…
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Dans le cadre de ce litige, l’action d’Ole Ahlberg a notamment pour base la violation de son droit moral au respect (dont le régime a été développé ci-avant). Mais il est un cas qui est plus extrême : c’est la situation dans laquelle le propriétaire de l’œuvre originale, qui a été cédée par l’auteur, en menace la pérennité ou la modifie.

Le droit au respect dont dispose l’auteur l’emporte-t-il sur le droit de propriété dont dispose une personne sur l’œuvre originale (pas sur les reproductions de celle-ci) ? Le titulaire du droit de propriété peut-il par exemple décider de modifier l’œuvre, ou de ne pas l’entretenir ? C’est là une réflexion à laquelle il nous semble judicieux de réfléchir. Le juge devra ici opérer un délicat arbitrage entre, d’un côté, le respect du droit d’auteur et, de l’autre, le respect du droit de propriété, sans qu’aucun de ces droits ne prévalent sur l’autre dans l’absolu. Il pourra notamment, pour ce faire, s’appuyer sur la théorie de l’abus de droit. Les circonstances d’espèce sont à cet égard tout à fait déterminantes et nous allons donc nous pencher sur plusieurs décisions jurisprudentielles afin de mieux cerner les contours de cette question.

Nous proposons ici de relever trois décisions rendues en rapport avec cette problématique. La première est celle de l’affaire Someville (1), dans laquelle l’auteur d’une fresque murale s’opposait au recouvrement de celle-ci au moyen d’une peinture en latex dans un dépôt communal. Le tribunal de première instance de Bruxelles a ici fait prévaloir le droit au respect, en invoquant notamment le devoir de la commune de promouvoir les œuvres artistiques créées par les citoyens. Une seconde affaire est celle de la piscine de Salzinne (2) dans laquelle les héritiers d’un auteur s’opposaient à la non-restauration de la peinture murale que le défunt avait effectuée dans un milieu chloré. Le tribunal de première instance a dans ce cas-ci décidé de favoriser le propriétaire des lieux et a justifié sa décision en soulevant le fait que la commune avait essayé de rechercher des alternatives pour éviter la destruction de l’œuvre, que le prix de sa restauration était exorbitant et que l’auteur savait en peignant qu’il plaçait son œuvre dans un milieu chloré, ce qui allait réduire de manière déterminante sa pérennité. Une dernière affaire que l’on peut relever est celle des maisons Kroll-Vandenhove (3). Celle-ci concernait des modifications apportées par les propriétaires de maisons qui avaient été construites dix années auparavant par un architecte, lequel s’opposait à ces modifications. Le tribunal de première instance de Bruxelles a ici fait prévaloir le droit de propriété des résidents en invoquant notamment le fait que l’artiste savait en dessinant le plan de ces maisons, qu’elles étaient destinées à être vendues à des particuliers.

On voit dès lors que les tribunaux envisagent les différents cas d’espèce séparément et invoquent des considérations de fait afin de faire pencher la balance tantôt en faveur du droit au respect de l’auteur, tantôt en faveur du titulaire du droit de propriété sur l’oeuvre.

En conclusion, il faut retenir que les droits moraux de l’auteur ne sont pas absolus : ils doivent parfois être nuancés par le droit de propriété lorsque l’auteur a cédé son œuvre. Il est en effet normal que ce dernier dispose de droits moins étendus lorsqu’il a permis à une tierce personne de devenir propriétaire de l’œuvre qu’il a créée.

Sources :
– Civ. Bruxelles, 3 juin 1994, inédit, cité par A. BERENBOOM, « Chronique de jurisprudence. Le droit d’auteur 1994-2000 », J.T., 2002, p. 673. (1)
– Civ. Namur (réf.), 31 mars 2000, AM, 2000, p. 427. (2)
– Civ. Bruxelles (réf.), 25 octobre 2002, AM, 2003, p. 59. (3)

– A. STROWEL et E. DERCLAYE, Droit d’auteur et numérique : logiciels, bases de données, multimédia, Bruxelles, Bruylant, 2000.
– A. BERENBOOM, « Chronique de jurisprudence. Le droit d’auteur 1994-2000 », J.T., 2002, p. 673.
– A. BERENBOOM, Le nouveau droit d’auteur et les droits voisins, 3e éd., Bruxelles, Larcier, 2005.

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Julian Delplanche
Cette saga jurisprudentielle oppose donc Ole Ahlberg à la société Moulinsart. On le sait, cette dernière est fort protectrice et est réputée pour son intransigeance en ce qui concerne les reprises du monde imaginé par Hergé. Le centre de l’affaire concerne ici l’exception de parodie et l’utilisation de l’action en cessation telle que prévue par la LDA, en son article 87,…
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Cette saga jurisprudentielle oppose donc Ole Ahlberg à la société Moulinsart. On le sait, cette dernière est fort protectrice et est réputée pour son intransigeance en ce qui concerne les reprises du monde imaginé par Hergé.

Le centre de l’affaire concerne ici l’exception de parodie et l’utilisation de l’action en cessation telle que prévue par la LDA, en son article 87, § 1er.

Tout d’abord, penchons-nous sur la problématique de l’exception de parodie. Cette dernière est prévue par l’article 26, § 1er, 6° de la loi. Elle couvre le fait de reprendre une œuvre dans un but d’amusement, et sans aucune volonté de prêter à confusion avec l’œuvre principale dans la tête du public. Elle est possible, mais uniquement conformément aux usages honnêtes du genre. Un jugement du tribunal de première instance de Bruxelles, développé ci-avant par Elisabeth Wirion, s’est d’ailleurs penché sur le régime de cette exception de parodie, pastiche ou caricature.

Ce qu’il importe de souligner est que si la parodie constitue une création qui appartient au domaine littéraire et artistique, qui est coulée dans une forme appréhendable par les sens (critère de mise en forme, les idées n’étant pas protégées par le droit d’auteur), et qui est empreinte d’originalité (en ce qu’elle revêt la marque de la personnalité de son auteur), elle se verra attribuer la protection que constitue le droit auteur.
A cet égard, on comprend mal le raisonnement tenu par le tribunal de première instance de Bruxelles dans son arrêt du 19 septembre 2003. Si le juge analyse bien que la parodie est l’une des exceptions au droit d’auteur, il en oublie que la nouvelle création, à condition de remplir les trois conditions que nous venons de citer et d’être acceptée comme une parodie, constitue elle-même une œuvre protégée. A ce titre, une action en cessation fondée sur la protection qu’offre le droit d’auteur sur cette œuvre est tout à fait légitime.
Cette décision est donc selon nous erronée, et est un bon exemple du manque de pratique courante de cette matière par les juridictions.

Analysons maintenant la problématique de l’action en cessation. Ce mécanisme juridique a été placé dans la loi afin de permettre à l’auteur de faire cesser de manière rapide et efficace l’atteinte dont il s’estime victime en tant que titulaire d’un droit d’auteur sur une œuvre.
Mais pour quel type d’atteinte cette action peut-elle être intentée ? Cela rejoint en partie la différence entre les droits économiques et les droits moraux à laquelle le professeur Nicolas Brahy faisait allusion en réaction au commentaire d’Hélène Gaspard.

La première catégorie concerne les droits économiques (aussi appelés pécuniaires ou patrimoniaux) qui comprennent le droit de reproduction et celui de communication au public de l’œuvre de l’auteur. Ces droits exclusifs permettent à l’auteur d’empêcher les reproductions et communications de son œuvre auxquelles il n’a pas consenti.

Il existe une autre typologie de droits protégés par la LDA : ce sont les droits moraux. Ce régime se décline lui-même en trois prérogatives différentes, prévues par l’article 1er, § 2, al. 3 à 7 de cette loi.
En premier lieu, l’on peut parler du droit de divulgation, qui n’est autre que la faculté reconnue à l’auteur soit de pouvoir faire connaitre au public sa création, soit justement d’interdire que l’une de ses créations puisse être connue du public.
En second lieu, l’auteur dispose du droit de paternité : c’est la faculté de revendiquer la paternité de l’œuvre, ce qui force de ce fait les tiers à la faire connaitre sous son nom. L’auteur peut également en faire usage de manière négative : il ne peut être forcé d’écrire son véritable nom sur son œuvre et peut de ce fait la communiquer au public sous un pseudonyme ou de manière anonyme.
Enfin, l’auteur dispose du droit au respect, ce qui signifie d’une part que l’auteur possède le droit de s’opposer à toute modification de son œuvre (le fait de résumer, de couper ou de détruire une œuvre par exemple), mais aussi d’avoir le droit de s’opposer à toute atteinte préjudiciable à son honneur ou à sa réputation.

Une action en cessation peut être intentée sur base des droits économiques, la doctrine est unanime quant à cela. En l’espèce, le demandeur base d’ailleurs son action en cessation sur le fait que la société Moulinsart, par différentes pratiques (sommation au galeriste, envoi d’un huissier de justice, …) a porté atteinte à sa volonté de communiquer son œuvre au public à l’occasion des expositions de 1998 et 2002.

Divers auteurs (mais c’est plus discuté) sont également d’avis que l’action en cessation peut être intentée en vertu d’une violation de l’un des droits moraux de l’auteur. Cela est en effet également le cas dans cette affaire, sous l’angle de deux droits particuliers.
Les efforts mis en œuvre par la société Moulinsart constituent en premier lieu une atteinte au droit de paternité du peintre Ole Ahlberg. Par ses agissements, le défendeur, ayant empêché le peintre de communiquer son œuvre, lui a par conséquent empêché de se révéler comme le créateur de celle-ci aux yeux des tiers.
Par ailleurs, le droit au respect, en ce qu’il englobe la protection de l’honneur et de la réputation de l’auteur, peut également être invoqué dans le cas qui nous occupe. En effet, il est clair que l’on porte atteinte de manière injustifiée au respect et à l’honneur d’un auteur lorsqu’on le qualifie de contrefacteur alors qu’une instance judiciaire est en cours. Pire encore, dans notre cas, alors qu’aucune instance judiciaire n’était pendante, la société Moulinsart a porté une telle accusation et elle a de ce fait mis à mal le droit au respect de Ole Ahlberg.
Le fait d’avoir réclamé de manière publique la destruction de l’œuvre sans prouver de contrefaçon constitue de surcroît la forme de violation la plus extrême de l’interdiction de modifier l’œuvre de l’auteur, autre aspect du droit au respect.

Le peintre disposait donc de droits protégés par la LDA auxquels les agissements de la société Moulinsart ont porté atteinte. En conséquence, il nous semble que cette action devrait être reconnue légitime par la juridiction d’appel penchée à statuer sur cette problématique suite au renvoi opéré par la Cour de cassation.

Si ce recours est admis, cela permettra notamment au peintre de s’opposer aux pratiques perpétrées par la société Moulinsart en cas d’une nouvelle exposition de ses peintures.
En revanche, si Ole Ahlberg souhaite réclamer des dommages et intérêts à l’autre partie, il ne pourra pas le faire dans le cadre de l’action en cessation. Il devra pour ce faire intenter un procès civil sur base de l’article 1382 et sera tenu d’établir une faute, un dommage, et un lien causal. Les conditions ne seront donc pas les mêmes que dans l’action en cessation. Cette dernière constituera cependant un bon appui concernant le bien-fondé de sa demande.

Sources :
– Loi du 30 juin 1994 relative au droit d’auteur et aux droits voisins, M.B., 27 juillet 1994, p. 19297
– Civ. Bruxelles, 15 février 1996, AM, 1996, p. 319.
– Civ. Bruxelles, 19 septembre 2003, AM, 2004, p. 38.
– Bruxelles, 14 juin 2007, AM, 2008, p. 23.
– A. STROWEL et E. DERCLAYE, Droit d’auteur et numérique : logiciels, bases de données, multimédia, Bruxelles, Bruylant, 2000.
– F. DE VISSCHER et B. MICHAUX, Précis du droit d’auteur et des droits voisins, Bruxelles, Bruylant, 2000.
– A. BERENBOOM, Le nouveau droit d’auteur et les droits voisins, 3e éd., Bruxelles, Larcier, 2005.
– F. DE VISSCHER, « L’objet d’une action en cessation et la parodie en droit d’auteur », J.L.M.B., 2007, pp. 1789-1792.
– B. MICHAUX et D. VOORHOOF, « L’action en cessation vise toute atteinte au droit d’auteur – Qu’est-ce à dire ? », AM, 2010, pp. 330-336.

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Hélène Gaspard  
Ce qui me semble très interpellant à travers la lecture de cet article est le fait qu'un parodiste poursuit l'auteur de l'oeuvre parodiée en justice (alors que c'est généralement l'inverse qui devrait se produire). La parodie constitue l'utilisation d'une forme d'humour en vue de se moquer d'une oeuvre. Cependant, comme nous le savons, toute utilisation d'une oeuvre sans en…
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Ce qui me semble très interpellant à travers la lecture de cet article est le fait qu’un parodiste poursuit l’auteur de l’oeuvre parodiée en justice (alors que c’est généralement l’inverse qui devrait se produire). La parodie constitue l’utilisation d’une forme d’humour en vue de se moquer d’une oeuvre. Cependant, comme nous le savons, toute utilisation d’une oeuvre sans en demander l’autorisation à son auteur constitue un acte de contrefaçon. Toutefois, il existe certaines exceptions au droit d’auteur, par exemple, la parodie.

En l’espèce, le peintre Ole Ahlberg a réalisé plusieurs tableaux dans lesquels se retrouvent les héros d’Hergé. Ces tableaux doivent selon Ahlberg être interprétés comme étant des parodies. Très vite, les ayants droits d’Hergé ont considéré que ces derniers constituaient des contrefaçons. Nous pouvons donc nous poser la question suivante: quelles sont les limites de la parodie? A partie de quand pouvons-nous considérer qu’il y a bel et bien contrefaçon?

Tout d’abord, pour pouvoir bénéficier de l’exception de parodie, encore faut-il poursuivre un but humoristique. Il est donc indispensable de vérifier qu’il n’y ait aucune confusion avec l’oeuvre originale. Cette parodie doit apporter quelque chose de personnel, constituer une oeuvre transformatrice. L’objectif poursuivit doit bien évidemment être celui de faire rire, sans rechercher a nuire à l’auteur de l’oeuvre originale. En-dehors de ces conditions, nous pouvons donc considérer qu’il y a contrefaçon.

En outre, l’exception de parodie trouverait différentes justifications: tout d’abord, la parodie permet d’exercer son droit à la liberté d’expression. Ensuite, elle serait également justifiée par le droit au rire. Enfin, elle permet de transformer l’oeuvre originale dans le but de rendre cette dernière “grotesque” de manière à interpeller le public.

Pour conclure, le droit d’auteur est fondamental et doit être respecté. Cependant, ce dernier connait diverses dérogations comme la parodie. Cette dernière que nous pourrions définir comme un “travestissement de la réalité” suppose la réunion de plusieurs conditions et mène très souvent à des situations pour le moins surprenantes. Selon moi, les conditions de la parodie devrait encore être plus strictes de manière à ne pas pouvoir dénaturer l’oeuvre originale. En effet, dans la plupart des cas, les auteurs mettent tout leur coeur et tout leur temps dans la création de leurs oeuvres, il nous appartient donc respecter cela.

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Nicolas Brahy

Vous parlez du respect de l’oeuvre.
Doit on traiter cette question dans la définition des exceptions au droit (économique) de reproduction? Ou bien (aussi) à la lumière des droits moraux ?

Charlotte Parent
Cet article m’interpelle parce qu’au-delà de la question de savoir si l’œuvre de Ole Ahlberg constitue une parodie de l’œuvre d’Hergé, une question plus large se pose à mes yeux : celle de la durée de la protection du droit d’auteur. Depuis la directive du 29 octobre 1993 (1), la durée de la protection est de 70 ans dans toute…
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Cet article m’interpelle parce qu’au-delà de la question de savoir si l’œuvre de Ole Ahlberg constitue une parodie de l’œuvre d’Hergé, une question plus large se pose à mes yeux : celle de la durée de la protection du droit d’auteur.

Depuis la directive du 29 octobre 1993 (1), la durée de la protection est de 70 ans dans toute l’Union européenne. L’article 2 de la loi belge du 30 juin 1994 relative au droit d’auteur et aux droits voisins (2) prévoit que : « Le droit d’auteur se prolonge pendant septante ans après le décès de l’auteur au profit de la personne qu’il a désignée à cet effet ou, à défaut, de ses héritiers conformément à l’article 7. » Ce délai écoulé, l’œuvre tombe dans le domaine public.

Mais cette durée est-elle encore adaptée ? Certains auteurs en doutent.

En effet, une telle protection augmente les coûts des œuvres dérivées contemporaines et notamment en matière d’œuvres cinématographiques (on peut penser ici à l’adaptation de Tintin au cinéma (3) pour laquelle des droits d’auteur importants ont été versés aux ayants droit d’Hergé).

Mais est-ce que cela se justifie vraiment ? Le but de la protection offerte par la législation est avant tout de protéger le droit de l’auteur. Or, nous commémorerons bientôt le trentième anniversaire de la mort d’Hergé. Ne pourrait-on pas considérer que son œuvre devrait déjà faire partie du domaine public ? Ou à tout le moins qu’elle devrait en faire partie avant 2053 ? Est-ce vraiment justifié de protéger ses ayants droit, même des générations après ? Peut-être que ceux-ci n’auront même pas connu Hergé !

Il me semble qu’une protection de 50 ans serait suffisante et ce, d’autant plus qu’il faut tenir compte du fait que la création date forcément d’avant le décès de son auteur. Nous connaissons le personnage de Tintin depuis 1930. Dans l’esprit des gens, ce personnage fait donc partie du patrimoine culturel belge depuis longtemps. On pourrait d’ailleurs s’interroger sur le fait que la protection débute au décès de l’auteur et non pas lors de la création de l’œuvre …

Cette question rejoint une question encore plus large qui est celle de l’utilité pratique de la protection des droits d’auteur. En effet, certains s’interrogent aujourd’hui sur la problématique complexe de la mise en œuvre de la protection du droit d’auteur. Les conceptions traditionnelles des droits d’auteur sont mises à mal parce qu’avec l’évolution technologique, faire respecter un droit d’auteur aujourd’hui n’est pas évident. Si par exemple, on viole la législation relative aux droits d’auteur en publiant un livre en ligne, la mise en œuvre de la protection du droit d’auteur ne sera pas aisée (qui est le responsable ? Où se trouve-t-il, quelle est la législation de ce pays, …) D’où le fait que certains se demandent nous devons davantage protéger les auteurs ou s’il ne serait pas plus efficace de supprimer cette protection.

Sources
(1) Directive 93/98/CEE DU CONSEIL du 29 octobre 1993 relative à l’harmonisation de la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins, Journal officiel n° L 290 du 24/11/1993 p. 0009 – 0013.
(2) Loi du 30 juin 1994 relative au droit d’auteur et aux droits voisins, M.B., 27 juillet 1994.
(3) Steven Spielberg : Les aventures de Tintin : le secret de la Licorne (2011)

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Elisabeth Wirion
Il y a des cas où un tiers n’a pas besoin de l’autorisation de l’auteur pour représenter son œuvre : il s’agit de la citation, de la reproduction d’une œuvre à l’occasion de comptes rendus d’évènements de l’actualité, de la communication dans le cercle de la famille et de la parodie. (1) Au fil du temps, de nombreux débats ont vu…
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Il y a des cas où un tiers n’a pas besoin de l’autorisation de l’auteur pour représenter son œuvre : il s’agit de la citation, de la reproduction d’une œuvre à l’occasion de comptes rendus d’évènements de l’actualité, de la communication dans le cercle de la famille et de la parodie. (1)

Au fil du temps, de nombreux débats ont vu le jour quant à cette dernière exception ; à partir de quand une œuvre est-elle une parodie d’une autre création ? Il s’agit de trouver le juste milieu entre le souci de protéger le créateur originel et celui de ne pas empêcher d’autres auteurs de produire de nouvelles œuvres.

La parodie est acceptée dans la mesure où elle est humoristique, critique et qu’elle exclut toute confusion avec l’œuvre originale. Il ne s’agit pas de faire une reproduction et encore moins de faire une reproduction déformée de la création originale. (2)

C’est dans ce contexte que le tribunal de première instance de Bruxelles (3) a énuméré quatre conditions qui devraient servir pour savoir quand l’exception au droit d’auteur est applicable :

« – la parodie doit elle-même être originale ;
– qu’elle ait pour but de railler l’œuvre parodiée ;
– qu’elle ait un ton humoristique ;
– qu’elle n’emprunte que les éléments apparents de l’œuvre et strictement nécessaires à la caricature pour ne pas entraîner de confusion avec l’œuvre parodiée, ni la dénigrer ».

La décision en cause devait trancher la question de savoir si le personnage de Tintin illustré sur des cartes postales et posters était une parodie ou non. Malgré ces conditions soigneusement énumérées, le tribunal a jugé l’affaire plutôt sur base du comportement de l’auteur que sur base des caractéristiques des reproductions. En effet, le tribunal a conclu que l’on ne pouvait pas parler de parodie puisque le deuxième auteur aurait voulu par son œuvre « s’approprier la notoriété de l’œuvre parodiée » et qu’en plus ces créations étaient « en dehors de tout contexte thématique de critique de l’œuvre de Hergé ».

Peut-on appliquer ces critères à l’affaire opposant Ahlberg aux ayants droits d’Hergé et de Magritte et conclure que Ahlberg n’a voulu que profiter à son tour de la notoriété de ces deux artistes en intégrant leurs œuvres dans sa création ? Selon moi, il faut répondre par l’affirmative. Si le premier critère de l’exigence d’une œuvre originale semble satisfait, comme l’a d’ailleurs relevé la Cour d’appel de Bruxelles, il est difficile de voir dans les œuvres d’Ahlberg une raillerie de l’œuvre d’Hergé. L’on pourrait certes argumenter que certains des tableaux d’Ahlberg montrent un Tintin jamais connu comme tel avant : si le contraste entre le Tintin vertueux de Hergé et le Tintin mis dans un contexte érotique de Ahlberg est assez frappant, cette circonstance suffit-elle pour établir une raillerie de l’œuvre parodiée ?

Concernant le troisième critère, si l’existence dans certains tableaux d’un ton humoristique est loin de constituer une évidence, la latitude d’appréciation est ici très grande et il peut paraître difficile de s’appuyer sur ce critère.

Pour ce qui est enfin du dernier critère interdisant tant la confusion que le dénigrement de l’œuvre parodiée, on pourrait opérer un rapprochement avec une autre affaire (4) concernant à nouveau le personnage de Tintin et qui présente des circonstances comparables à l’affaire Ahlberg. L’affaire en cause opposait Casterman et Hergé à Charles Callico, auteur de l’album « Tintin en Suisse », qui représente le héros des aventures d’Hergé dans un cadre plutôt inhabituel dans lequel l’exploit sexuel et la pratique de drogues jouent un rôle assez important. La Cour d’appel de Bruxelles a conclu dans cette affaire que l’appropriation du personnage de Tintin a été faite « avec méchanceté, c’est-à-dire avec le désir de nuire, de causer un dommage matériel ou moral ».

Il est vrai que cet arrêt a été critiqué en doctrine en ce qu’il « méconnaît les principes mêmes du droit de la parodie ». (5) En plus, il est clair qu’en pratique qu’il n’est pas aisé de démontrer cette intention de nuire, tout dépendra des circonstances de fait.

Il me semble quand-même que, même si on n’arrivera pas à prouver la reproduction méchante dans l’affaire Ahlberg, une condamnation devrait être possible sur base du fait que les critères dégagés par la jurisprudence pour justifier de l’exception de parodie ne sont pas tous satisfaits et qu’en définitive Ahlberg profite de la réputation de Hergé et de Magritte pour vendre ses œuvres. En fin de compte, qui parlerait de ces œuvres sans l’intégration des héros de Hergé et des œuvres de Magritte ?

Sources :

(1) Loi du 30 juin 1994 relative au droit d’auteur et aux droits voisins, M.B., 27 juillet 1994, p. 19297.
(2) Ministère de l’éducation nationale, Le droit d’auteur : principes généraux, Bruxelles, Ministère de l’éducation nationale, 1988, p. 25.
(3) Civ. Bruxelles, 15 février 1996, A&M, 1996, p.319.
(4) Bruxelles, 8 juin 1978, Ing.-Cons., 1978, p. 318.
(5) A. BERENBOOM, « Le droit d’auteur », Bruxelles, Larcier, 1984, p. 114, n° 91.

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Maureen Baikry  
Je trouve le sujet intéressant dans la mesure où la problématique de la reproduction dépasse largement ce simple procès et s'implique dans quelque chose de plus général qui touche en réalité toute production. En effet, à partir du moment où un artiste crée une oeuvre et la rend publique il doit s'attendre à ce que le-dit public la critique (positivement ou…
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Je trouve le sujet intéressant dans la mesure où la problématique de la reproduction dépasse largement ce simple procès et s’implique dans quelque chose de plus général qui touche en réalité toute production.

En effet, à partir du moment où un artiste crée une oeuvre et la rend publique il doit s’attendre à ce que le-dit public la critique (positivement ou négativement), la reproduise, la déforme, etc. C’est pratiquement inexorable à l’époque actuelle. C’est une chose également importante afin que puisse s’épanouir une création artistique, chaque artiste se nourrissant du travail des autres.

Néanmoins, il me semblerait normal que l’auteur initial ou les personnes représentant ses intérêts puisse avoir un droit de regard sur ces déformations. Dans la même veine que Ole Ahlberg, nous pourrions citer notre contemporain Wim Delvoye qui a lui aussi redessiné certaines figures emblématiques des studios Disney dans des situations plus que scabreuses.

Jusqu’où peut-on aller dans la dénaturation d’une oeuvre? Le sens initial peut-il réellement être détourné pour en faire quelque chose de foncièrement différent.

Je pense qu’il faut trouver un juste milieu pour ne pas trop brider le processus de création artistique et l’empêcher de créer du nouveau. Métaphoriquement parlant ce serait comme le serpent qui mord sa propre queue.

La difficulté est que l’art ne se satisfait pas du politiquement correct, ce qui me laisse penser que la problématique que nous avons abordée est probablement une histoire sans fin…

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Nicolas Brahy  

Dans quel(s) aspects du droit d’auteur se trouve(nt) selon vous l’articulation juridique de ces questions?

Eléonore Migeal
Je me permets de rebondir sur votre question car celle-ci m'a interpellée et m'a paru permettre une ouverture du débat sur des aspects du droit d'auteur pas encore abordés dans les commentaires du présent article. D’après moi, l’aspect du droit d’auteur qui peut être principalement retrouvé dans les questions soulevées par Maureen Baikry est son rôle d’incitant à la création. Lors…
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Je me permets de rebondir sur votre question car celle-ci m’a interpellée et m’a paru permettre une ouverture du débat sur des aspects du droit d’auteur pas encore abordés dans les commentaires du présent article.

D’après moi, l’aspect du droit d’auteur qui peut être principalement retrouvé dans les questions soulevées par Maureen Baikry est son rôle d’incitant à la création.

Lors du cours, nous avons surtout analysé la fonction d’incitation économique du brevet, mais il me semble qu’il s’agit également d’une facette du droit d’auteur. En effet, une œuvre protégée par un droit d’auteur demande souvent autant d’investissements psychologiques, matériels, financiers ou temporels qu’une invention protégée par un brevet. La création d’une telle œuvre nécessite donc, au même titre qu’une invention brevetable, des incitants comme la propriété intellectuelle, afin non seulement d’amortir les coûts de ses recherches, mais également d’exercer pleinement ses droits moraux sur sa création.

Sans incitant économique, et donc, sans droit d’auteur, personne ne créerait car personne ne verrait sa ou ses créations assortie d’une protection suffisante pour qu’il ait valu la peine, d’un point de vue économique et moral, de les réaliser. Cependant, le droit d’auteur dans sa forme la plus puissante peut également conduire à rendre la création moins aisée, en ce sens qu’il empêche de s’inspirer à outrance d’une œuvre protégée. Or, tout créateur tire toujours ne serait-ce qu’une infime partie de son inspiration d’une autre création.

Force est donc de constater que le droit d’auteur oscille entre deux pôles presque contradictoires : il sert, d’une part, à encourager les personnes à créer et, d’autre part, à empêcher d’autres personnes de créer à partir d’une copie de l’œuvre qu’il protège. Il fait donc office à la fois d’incitant et d’obstacle à la création.

Ce constat pourrait servir de base pour expliquer le fait qu’en Belgique, la parodie est une exception au droit d’auteur. Elle se situe en effet aux confluents des deux « facettes » du droit d’auteur, entre le respect du droit d’exclusivité conféré par ce droit et l’incitation à la création qu’il entend promouvoir. Cette exception est donc, à mon sens, une bonne illustration du juste milieu qui doit être trouvé entre les tensions qui traversent le droit d’auteur.

Dans le cas d’espèce, Ole Ahlberg, l’auteur de plusieurs peintures parodiant des œuvres d’Hergé et de Magritte, s’est vu imposer des restrictions à mon sens excessives à son droit d’auteur, et donc à son envie de création, sous prétexte de la violation d’autres droits d’auteurs – ceux des ayants droits d’Hergé et de Magritte –, dans leur dimension de protection de l’œuvre. Suite à ces mises en demeure, Ole Ahlberg a intenté une action en cessation contre les ayants-droits des deux artistes décédés, en vertu des droits patrimoniaux et moraux attachés à son droit d’auteur. Il semble donc que le cas commenté soit un bel exemple de la tension inhérente au droit d’auteur entre la protection d’une œuvre et l’incitation à la création.

En l’occurrence, la protection qu’offre la propriété intellectuelle a sans doute incité – sinon conforté dans son idée – l’artiste danois à peindre ses toiles parodiques, tandis que les ayants droits de Magritte et Hergé ont actionné cette même protection offerte par le droit d’auteur pour freiner la création d’Ole Ahlberg, jugée trop proche et trop dénigrante des œuvres originales. On constate donc qu’un même droit sert deux intérêts opposés.

C’est dans ce type de cas qu’il faudrait précisément trouver un juste milieu entre protection et création. En l’espèce, la création d’une parodie des BD d’Hergé et des tableaux de Magritte n’empêche en rien la protection efficiente et efficace de ceux-ci contre des utilisations ou appropriations contraires au droit d’auteur, comme, par exemple, la contrefaçon ou la copie.

Dès lors, mon avis est que l’action en cessation intentée par le peintre danois est justifiée au regard du non-respect de ses droits patrimoniaux et moraux découlant du droit d’auteur qu’il détient de ses œuvres. Déclarer une telle action infondée serait, d’après moi, nier un des buts premiers de la propriété intellectuelle, qui est celui de promouvoir la création dans le respect la protection de ce qui a déjà été créé.

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